LE CARBET

Aux pieds de la montagne Pelée

MADININA : Le Carbet

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Le Carbet hérita son nom, de ses premiers découvreurs, les Indiens caraïbes. "Carbet" est un mot amérindien qui signifie "grande case".
C'est-à-dire, la case où les chefs se rassemblaient lorsqu'il fallait prendre des décisions.

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Le bourg du Carbet s'étend en longueur sur la côte caraïbe, au nord de l'île. Tout au long du village, des plages de sable noir s'étirent face au bleu intense de la mer. Sur la route de Saint-Pierre la plage de Grande-Anse paraît rejoindre l'ancienne capitale, tant elle est longue. Le charme mystérieux et sévère des plages de velours noir étouffe presque la rumeur de la mer. Nos petites vies sont littéralement écrasées par les immenses cocotiers qui filent vers le ciel. Les yeux sont émoustillés par la palette infinie des nuances et des lumières. Il règne une ambiance particulière dans le Nord de l'île. Moins touristique, cette région charme par le contraste de ses reliefs qui s'égrainent du niveau de la mer jusqu'aux cimes des volcans.

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Le nord de la Martinique

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Je ne suis pas bigote, mais je me rends compte qu'en effectuant la visite du Nord de l'île, le pôle central de chaque ville où nous nous sommes arrêtés, s'est révélé être l'église. Chaque village entretient avec beaucoup de respect son lieu de culte. Les villageois s'y réunissent aux offices du vendredi et du samedi soir. Les plus belles messes sont en général, celles du dimanche matin. C'est le jour, où sur le parvis des églises, nous pouvons admirer les doudous en madras. Vous me direz que j'exagère... Pas du tout, du tout ! C'est une tradition qui est réelle et contagieuse dans chaque île de la Caraïbe. Quelle que soit l'obédience des fidèles, ils s'endimanchent encore en ce début de 21e siècle. Pas question de se rendre à l'église en short, en jeans ou en jogging ! Les petites filles portent des robes claires souvent blanches ou roses, des petits noeuds assortis dans leurs cheveux. Les dames sont parées de leurs colliers chou, en tailleur ou en robes traditionnelles, de toute façon ce jour-là c'est la ronde des froufrous et des dentelles. Les robes de madras sont parfois encore assorties du chapeau traditionnel à pointe. Les hommes adoptent l'allure sérieuse et le costume qui leur sied. Les petits garçons rangent au placard leur espièglerie et sont habillés en tout point pareil comme leur grand-père et leur père. Voici le tableau dressé des dimanches matins autour des églises des Antilles. Ambiance sérieuse à l'entrée, grands éclats de voix et rires détendus à la sortie...

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Outre la tradition respectée jusqu'à nos jours, les Martiniquais se souviennent de trois illustres hommes d'Église. Le père du Tertre, le père Labat, et l'abbé Goux. Ce dernier officiait au Carbet. Son église ainsi que celle de Case-Pilote au sud, et du Prêcheur au nord de Saint-Pierre furent les premières églises de l'île bâties en matériaux durs. Elle fut terminée en 1776. Elle garde en ses pierres le souvenir de l'Abbé Goux. En effet, après Christophe Colomb, d'Esnambuc et Du Parquet, l'abbé Goux marqua les souvenirs du bourg paisible. De 1835 à 1861, l'abbé Goux fut le curé du village. Doté d'une forte personnalité, il écrivit un livre de catéchisme en créole. Il créa une école pour les filles et une autre pour les garçons. Il oeuvra pour qu'un pont soit construit sur la rivière qui descend des deux pitons. L'église qu'il fit réparer après le tremblement de terre de 1839, échappa à la nuée ardente de 1902. Aujourd'hui classée monument historique, elle arbore fièrement sa façade baroque du dix-huitième siècle. C'est aussi grâce à l'abbé Goux que l'on peut passer de Saint-Pierre au Carbet sans se mouiller les pieds. Il en était ainsi avant qu'il n'ait l'idée de percer un tunnel dans le morne qui séparait les deux villes. Aujourd'hui encore, même si la route est plus large que celle percée par l'ingénieux homme d'Église on emprunte ce tunnel. On voit à tout ce qui précède, combien cet homme aura marqué le village. C'est la raison pour laquelle il est encore honoré en son église.

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Le Musée Paul Gauguin, est la fierté du village du Carbet. Ce centre d'art a été édifié par Maïotte Dauphite en 1979. Il évoque la vie de l'artiste et présente des reproductions photographiques de son oeuvre martiniquaise. Dans une lettre à C. Morice datant de 1890, le peintre constate : "L'expérience que j'ai faite à la Martinique est décisive. Là seulement je me suis vraiment senti moi-même et c'est dans ce que j'ai rapporté qu'il faut me chercher (...). " Le musée se situe non loin de l'Anse Turin, près de l'endroit où Paul Gauguin et son ami Charles Laval s'installèrent dans une "case nègre ". De juin à novembre 1887, la Martinique fit éclore le talent que nous reconnaissons aujourd'hui au célèbre Gauguin. Peut-être faut-il vénérer en cette occasion le fruit du hasard qui conduisit le peintre en Martinique. Même si ce cadeau du destin fut éphémère, puisque Gauguin choisit Tahiti pour parfaire le développement de sa personnalité. N'oublions jamais, que la Martinique invita le maître à franchir les portes qui menaient sur les chemins de l'aventure décisive pour lui que fut la découverte de l'exotisme. Il puisa dans l'éclat de la végétation tropicale et les suaves nuances colorées du paysage les éléments d'une peinture renouvelée. Il trouva, ici, le style qui le rendit célèbre. La Martinique, qui était encore l'image parfaite du paradis réveilla en lui la passion de la beauté et révéla ses talents de peintre.