CORSE - ILE DE BEAUTE

Méditerranée

Comment aborder la Corse ?

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Comment parler de la Corse sans perpétuer les erreurs déjà commises ? J’ai toujours la sensation que les préjugés se liguent contre la Corse. Et, je n’aime pas ça !

Chaque année, de nombreux articles paraissent sur le sujet. En général au mois de juin, des revues, y consacrent leur numéro spécial. Et le touriste atterrit en Corse la tête farcie de stéréotypes. Des titres accrocheurs limitent le paysage et la culture corse à un mot ou une expression.

Ha non !

Ce serait trop simple !

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La Corse ne se laisse pas emprisonner dans une locution de quelques mots. La Corse ne se limite pas à quelques comparaisons simplistes. Aller en Corse et y voir autre chose qu’elle-même, c’est l’insulter. La Corse ne ressemble à rien. La Corse se ressemble à elle seule ! La Corse est UNIQUE ! La Corse est LE pays où les superlatifs gagnent leur titre de noblesse.

D’aucuns abordent la Corse avec les œillères fabriquées par les médias. Leur opinion sur le peuple corse est forgée par des contes où se mêlent fantasmes et phobies. Ils regardent le corps social de la Corse comme une énigme. Ils lisent ou entendent tout et son contraire à propos de « mystérieuses pratiques ». Cette débauche d’informations, lancées en pâture, contribue à donner une image de labyrinthe à la société corse. De plus, la plupart des gens, qui arrivent sur leur site de vacances, prennent possession de l’espace en oubliant que les autochtones sont, eux, dans leur quotidien. Les lois les plus élémentaires du respect sont alors bafouées. C’est exaspérant ! Je dois avouer que la Corse n’est pas la seule région dans ce cas. Je ne fais pas de généralité, mais en Corse, il y a parfois dans l’esprit du vacancier une mentalité de conquérant en prime…

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Foulez le sol de l’île avec la tenue et l’humanité dont vous faites preuve lorsque vous entrez dans une maison où l’habitant vous accueille en toute convivialité ! Vous y avancerez comme au sein d’une grande famille, corrélée par une culture exceptionnelle. Les liens entre les clans sont tissés de traditions et de raisons séculaires, cela fait partie de leur intimité, pourquoi vouloir à tout prix percer leur confidentialité ? Abordez la Corse et son peuple, l’esprit libéré de tout apriorisme. Et surtout, laissez toute curiosité malsaine, tout comportement hégémonique de l’autre côté de la mer.

Enfin, suivons les préceptes de ce bon Sénèque, qui était sans doute le premier « publicitaire » de l’île, encourageant ses contemporains à venir en Corse : « Viens, viens sur ces rives désertes, dans ces îles sauvages, Gyare et la Corse. »

La traversée

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Une histoire corse commence toujours par une traversée. La nôtre démarre, hasard du calendrier familial, un mercredi 20 août au départ de notre fief : Agay. Quatre-vingt-dix milles nous séparent de l’île, et nous espérons en ce milieu de semaine ne pas rencontrer trop de monde. Belles illusions que voilà ! Cette croisière fut sans conteste, la navigation la moins solitaire, que nous ayons effectuée en 110 jours de périple sur la Méditerranée. Toute rencontre est concevable sur ce parcours : des plus banals paquebots, cargos et autre ferry, aux plus rapides NGV, en passant par les plus lents : nous pauvres voiliers sans vent, sans oublier les plus psychédéliques yachts transformés pour la nuit en discothèques luminescentes accessoirement flottantes. À vrai dire, je suggérerais volontiers aux autorités maritimes d’installer des feux de signalisations tous les cinq milles et un grand rond point entre Corse et continent, afin de réguler au mieux le flux de cette impétueuse autoroute.

Météo moralisante…
Deux maîtres mots: Vigilance et Patience

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Sans vouloir vous assommer avec des notions de météorologie, qui seront traitées dans un chapitre spécial. Je me dois d’en parler ici. Car les conditions météo ont piloté notre périple en Corse. Les traversées d’abord, qui souvent sont révélatrices du fonctionnement binaire de la Méditerranée : « tout ou rien ! »

À l’aller, nous avons eu de la chance : vingt heures de voile contre cinq heures de moteur. C’est honorable ! Si, si !!! Entre les zones Ligure et Corse, souffle un petit vent marin de nord-est très agréable. À condition toutefois de partir sous des conditions anticycloniques. Il s’établit à 15/20 nœuds, et permet une navigation aux allures portantes… Idéal ! Le tout est de le trouver… Et de le garder !

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Au retour, par contre, les conditions ont été beaucoup moins favorables. Fin septembre sonnait le glas de la belle saison. Un coup de vent était annoncé dans les 48 heures. Nous ne voulions pas rester coincés en Corse. D’autant plus que nous étions dans le Nord, où des perturbations orageuses suivies d’un fort courant d’est étaient prévus. Nous savons tous, qu’avec un tel pronostic météo, il faut fuir la région ! Nous sommes donc partis par calme plat. Jamais, nous n’avions vu la mer aussi calme, pas de houle, pas la moindre ride. Un plancher de dauphin parfaitement lisse ! Conditions idéales pour observer nos amis cétacés. Par contre, à notre approche du continent, le coup de vent avait de l’avance. Au lieu de se révéler d’est, ce qui nous aurait poussés aux allures de travers, nous l’avons eu dans le « pif ! » Pile poil ! Le vent a rapidement grimpé l’échelle de beaufort se complaisant sur l’échelon 6 et aimant flirter en rafales avec le septième niveau.

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Quant-à, notre séjour…
À peine, étions-nous arrivés à Calvi, qu’un avis de force 7 était annoncé. Nous avons déguerpi vers le golfe d’Ajaccio, trouvant abri (houleux), à Sainte Barbe, pendant plusieurs jours. D’autres eurent moins de chance, puisqu’un voilier de onze mètres a perdu 4 hommes à 40 miles au large de Calvi. L’un d’eux a été récupéré, vivant, dans les 48 heures du chavirage, un miraculé ! Plus tard, nous trouvons refuge à Campomoro où nous tenons bon, lors de deux coups de vents successifs de sud-ouest.

C’est simple, entre le 28 août et le 22 septembre, nous avons enregistré 35 BMS !

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Lorsque nous ne subissons pas de coups de vents, ce sont les orages qui nous tourmentent ! Nous avons eu l’occasion d’y goûter à Tuara la baie jumelle de Girolata. Après une journée calme et chaude, les vents se sont levés vers minuit. Ils ont atteint plus de cinquante nœuds en quelques minutes. Je n’ai eu que le temps d’agripper Lune et de la descendre dans le carré (son tapis s’envolait déjà !) Ensuite, tout en allumant le moteur, il a fallu réveiller le Cap (nullement gêné par le son et lumière Céleste !). Sur ce temps, nous avions dérapé sur plus d’un demi-mille. L’annexe, retournée, avait perdu son contenu dans les profondeurs de Scandola. Elle laissait, le moteur hors-bord, perplexe de s’être retrouvé la tête dans l’eau. Dans l’anse de Girolata, toute la nuit, ce fut la foire d’empoignes.

Les orages fouetteront plusieurs fois notre sillage. À Campomoro, entre deux coups de vents, nous avons tout arrimé sur le pont en attendant que leurs vents furieux passent. Le dernier à Sagone, a encore levé des vents erratiques à plein régime, atteignant 40 nœuds au milieu de la nuit. Pendant notre séjour, la Météo nous a également gratifiés de trombes marines… Cette fois encore, nous avons préparé le bateau en vue de faire le dos rond. Que faire d’autre ? Heureusement, nous y avons échappé !

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Nous avons fini en beauté toutefois ! Mi-septembre, un anticyclone a eu l’extrême bonté de croître au-dessus de la Corse. Il y est resté six jours. Nous permettant de mouiller, comme à l’hôtel, dans des endroits réputés houleux, voire dangereux. De plus, à cette période, la Corse se vide de ses touristes trop pressés de vivre à la sauvette leur croisière. Nous nous sommes retrouvés absolument seuls dans des mouillages de rêves. GÉNIAL !!! Nous avons eu, enfin (!), la sensation de profiter de la liberté qu’offre ce type de voyage. Nous nous sommes régalés !

La morale de cette histoire : « Tout vient à point à qui sait attendre ! »