Nous sommes saoules! Depuis Tahiti nous n'avions pas vu autant de voitures.
Les bouchons de Port Villa!
Ah ça, vaut le coup!
Des minibus, des pick-up chargés de femmes aux grandes robes colorées, des enfants plein les bras. Des hommes aux faciès imprimés de rides profondes, arborant des tee-shirts à l'effigie de Bob Marley... De la musique, des notes aux teintes de reggae, je crois reconnaître une mazurka... un fond de biguine. Ces fleurs imprimées sur les robes, ces petites dentelles blanches aux manches, ici plus rien n'est polynésien.
Bizarrement, je ressens à la fois quelque chose de familier et de dépaysant. Le côté familier est inspiré par des relents de créolité. Quelque chose d'Afrique, pourtant, nous en sommes si loin! Les femmes vanuatanes, sans ressembler physiquement aux Antillaises, ont une allure, un déhanchement, une nonchalance, cette manière de partir en éclats de rire ou au contraire de faire la moue, ..
Ah, il y a quelque chose, c'est sûr!
Mes oreilles cherchent un air de « zouk la se seul medicamen nou mi... zouk la vie com si pa ni pwoblem ». Elles pourraient le trouver si elles badaient assez longtemps dans le coin... Mais ici, personne ne parle le créole... Personne ? Et bien, le hasard nous met sur la route de Georges, un Réunionnais, qui est ici depuis plus de 30 ans. Il nous alpague : « Vous ! Vous êtes Français ! ». Il nous explique ce que nous voyons et que nous ne comprenons pas d'un seul coup d'oeil.
Le climat n'est pas là pour nous charmer. Le paysage non plus. La ville est mal fagotée, en effervescence permanente, partout des grues lèvent des murs d'hôtels, d'immeubles. On investit à Port Villa! Qui? Ne me le demandez pas. Mais les affiches publicitaires, le nombre incalculable d'agences immobilières, les banques en enfilade sur la rue principale sont autant de signes de la volonté locale à attirer les investissements d'où qu'ils viennent.
Un décor brouillon, presque burlesque de belles façades pour les banques et les agences immobilières, au bord d'une rue dans un état désastreux. La poussière embrume les habitants qui déambulent dans cette ville où j'ai la sensation bizarre qu'ils s'y sentent eux-mêmes étrangers.
Paraît-il que seule Port Villa dispose de l'électricité sur Efaté. Le reste de l'île est plongé dans l'obscurité. Lors de notre dernière nuit de navigation, j'avais été étonnée de découvrir cette terre noire. Si noire, si basse qu'un moment j'ai cru qu'un grain se reflétait sur l'horizon. J'ai mis un moment à réaliser que nous longions une côte. Je l'ai pensée désertique, vidée de tout habitant. Mais Georges nous a certifié que l'île est très peuplée. Cependant hors de Port villa, les habitants vivent, comme il ont toujours vécu, à la lueur du feu de bois. Ce bois vendu en fagots sur le marché.
Nous sommes sous le charme.
Et tant pis pour le mauvais temps, nous avons décidé d'attendre qu'il se rétablisse, pour nous consacrer pleinement à cette escale, qui nous promet de belles découvertes!