Maorina : pension au bord du lagon
Les bungalows de Maorina
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Notre bateau étant immobilisé à Tahiti faute de guindeau, nous décidons
d'aller nous retirer sur Moorea l'île voisine. Nous prenons donc
l'Aremiti, ferry inter-îles. L'océan n'ondule pas plus qu'un pot de
miel, l'alizé est tranquille. Les huit dents de basalte , identifiant
Moorea, s'approchent à la vitesse de l'éclair. Déjà, nous débarquons à
Vaiare (la capitale), nous découvrons une marina lilliputienne, une
montagne percée, et sur le quai, Raphaël : longs cheveux crépus serrés
dans un catogan, le haut du corps si tatoué qu'il paraît habillé, un
tiki souligne le tracé des abdos, pieds nus, tout sourire, il nous
salue.
L'archétype du Polynésien!
Cependant, j'ai peine à reconnaître son accent. Il ne roule pas le « r
» comme les gens d'ici. La curiosité féminine est diabolique et pousse
toujours aux questions qu'il faut, ou ne faut pas... Et notre Raphaël
se révèle Suisse, installé avec sa jolie vahiné Anne Marie depuis 5 ans
à Moorea. C'est certain, il fera bientôt concurrence à Teve, le
Polynésien le plus tatoué de l'archipel. Mais, surtout, avec
Anne-marie, il loue quatre petits farés au charme irrésistible dans une
vallée retirée de Vaiane.
Il n'est pas toujours aisé de choisir un point de chute sans autre
repère qu'un guide. En Polynésie le choix se corse, lorsque le boulier
compteur s'en mêle! Les tarifs sont souvent prohibitifs, mais il existe
sur chaque île, des bons plans. Dès notre installation, nous savons que
nous ne nous sommes pas trompés. Nous sommes à l'écart des grands
centres touristiques. Notre terrasse, à cinq mètres du plan d'eau est
entourée de purau (variété d'hibiscus) et de cocotiers. Nous entendons
les poules, les passereaux. Au loin, l'océan se fracasse sur la
barrière de corail. L'eau n'est pas, au bord du faré, de la couleur
idyllique qu'on imagine, mais elle brille de tous ses feux à quelques
coups de pagaies de là.
Raphaël aux mille tatouages
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Le temps s'arrête.
Emprisonnées entre les deux aiguilles de l'horloge récalcitrante du
faré, les heures s'égrainent comme nulle part ailleurs. Sans bruit,
sans mouvement ou si peu, l'heure trébuche sur la demi, recule après le
quart. Cette horloge compte aussi bien que moi, elle est, sans
conteste, ma jumelle de coeur!
Le premier soir, quel émerveillement!
Nous voyons la mer depuis la terre. L'île, accablée toute la journée
d'un soleil de plomb, s'apaise. La chaleur se retire à pas feutrés, une
fraicheur légère nous enveloppe et réveille une tranquillité palpable.
Un silence inaccessible aux gens de mer.
Quelques chiens aboient. Les coucous interpellent des merles agités. Un
enfant crie. Un moustique, anesthésié par le tortillon d'encens, tente
une échappée. La mer, au loin, tamise son grondement sur le récif .
Horizon intouchable aux terriens.
Les nuages gagnent la haute mer, se drapent de l'étoffe du couchant et
se mirent sur l'eau calme. Fini le scintillement des mille joyaux du
lagon. Le soleil succombe aux nuances pastel, répond à l'appel du
large. Je suis contaminée par un virus endémique :
La maladie du hamac.
A marée basse, le limon, drainé par la vallée, frétille de petits
bruits de sussions. Des milliers de ronds trahissent les mouvements des
larves prisonnières du jusant. Un héron fait le pitre, démarche de
hauts talons, il joue au coquet qui ne désire pas se mouiller les
mollets. Le cou fouineur, il se régale. La lune chasse le soleil, les
geckos ponctuent la nuit de leurs appels brefs, ils dégustent quelques
papillons imprudents. Un crabe, pinces en alerte, yeux en périscope, se
faufile le long du mur, il surveille le balancement de mon hamac. La
nuit est douce et insouciante.
Rien de trop beau pour démarrer le tour de l'île!
Leur site internet : Fare Maorina