HUAHINE

 


Doucement indépendante...


L'insouciance de Huahine

J'avoue qu'en pénétrant par la passe nord dans le lagon de Huahine et en mouillant devant le petit village de Fare, j'ai ressenti une légère déception. Tant d'amis m'avaient vanté Huahine. Ils me disaient : "tu verras, c'est la plus belle des îles de la Société, la plus authentique". Sans doute avaient-ils placé la barre un peu haute? Et moi, je m'attendais à une combinaison de "Raiatea+++, Moorea++++, Bora ++++++!" J'ai tant aimé ces îles, il était difficile de les concurrencer dans mon coeur. Deux petits jours à Fare, dans le nord de Huhiné évoquaient, en moi, un "bof" désabusé.


Bonne leçon! Moi qui me targue de ne jamais comparer aucune escale, de l'appréhender pour elle-même, sans préjugés, bref d'arriver partout avec le regard pur, je suis piégée!


Huahine est très très... mais alors TRES différente de ses soeurs. Si depuis des mois, je fais des photos aux dominantes émeraude-turquoise et lumineuses, que l'on qualifie dans le nuancier de teintes froides, à Huahine j'ai complètement changé de registre. Dans le soleil de l'après-midi, l'île entière revêt des teintes chaudes aux nuances dorées et vert foncé.


Le Fare Potee

Un autre monde!


Une des plus grosses différences est que la route qui fait le tour de Huahine entre dans les terres. De Tahiti à Moorea, en passant par Bora, lorsqu'on fait le tour de l'île, on se limite à la ceinture du ras de l'eau. A Huahine, la route grimpe sur les collines, s'enfonce dans les forêts, vire autour de fjords intérieurs.


Les deux baies jumelles qui séparent les deux îles de Huahine Nui (au nord) de Huahine Iti (au sud) amplifient sensiblement cette impression. Deux fjords enjambés par un petit pont de pierre reliant les deux îles, offrent des paysages faits de baies échancrées, de plans d'eau gris bleuté, entourés de montagnes rondes, dodues interrompues ça et là de proéminences suggestives qui inspirèrent des légendes triviales sur le dieu Hiro.


Paraît-il que le dieu Hiro, le dieu des voleurs, sacré dans les îles sous le vent, aurait, par orgueil mal placé, laissé son appendice reproducteur en guise de fanal au beau milieu des crêtes de Huahine... Plus loin, ce serait sa pagaie qu'il ficha dans la falaise d'un coup de colère. D'un oeil espiègle, les habitants de Huahine, nous demandent de prononcer le nom de leur île. Ils sourient sous cape, et nous demande d'insister sur les aspirations des "h", sans quoi, ces deux mots accolés perdraient leur signification "Hua" "trou" "Hine" que vous retrouver dans vahiné est la fille, la femme. Arrêtons là les descriptions scabreuses, avant de glisser sur ce terril de terre, qui nous mène tout droit dans le repère des anguilles sacrées. Des anguilles longues de deux mètres dodues et gourmandes qui viennent au bord de la rivière dès qu'elles vous aperçoivent et qui quémandent, comme le feraient des toutous aquatiques, les maquerelles vendues par le petit magasin qui s'est installé juste en face!
La belle affaire!

Anguille sacrée

Dans ce coin perdu, le monsieur assuré de son chiffre et cela pour la satisfaction des petits et des grands curieux. Les enfants du village (en vacances de Pâques) se font une joie de prendre la boîte de poisson et de la distribuer aux anguilles qui révèlent alors des yeux bleus vitreux, comme si elles étaient toutes atteintes de cataracte.


Anguilles sacrées, fjords, nous ne sommes pas au bout de nos surprises...


Le nord de l'île est littéralement parsemé de marae (lieu de culte maohi) qui témoignent d'une population abondante et florissante avant la venue des "navigateurs étrangers". Plus de 28 d'entre eux ont été mis à jour dont 16 joliment restaurés. Leur situation est particulière, car au nord, un motu se referme sur une lagune. L'île et le motu se rejoignent vers le sud, donnant l'impression qu'une rivière qui s'écoule. Là, des pièges à poissons en pierre très ingénieux ont été édifiés. Cela donne une enfilade de parcs à poisson, de blocs de corail immenses dressés sur le rivage marquant l'enceinte des marae et de maisons de bois colorées. Le tout se succède au sein de cocoteraie au bord d'une eau calme et sinueuse.


Paysage de Huahine

Il y règne une atmosphère stagnante, où les bruits s'étouffent dans la végétation, où l'eau même semble ne pas oser bouger. Sans doute est-ce cette ambiance qui inspire aux visiteurs les termes "authentiques" et "sauvages" repris en écho par tous les articles des revues touristiques. Pourtant, à être franche, je n'y trouve rien de sauvage, ce qualificatif ne lui convient pas. Je la trouve plutôt "doucement indépendante" à en croire le nombre de drapeaux bleu et blanc qui flottent sur les maisons.


Loin de moi l'idée de faire de la politique, ceux qui ont vu le "Thalassa" sur la Polynésie ont certainement entendu le témoignage de cette dame indépendantiste de Huahine. Ce mouvement qui aime à faire flotter les couleurs bleu azur et blanc fait-il ici plus d'émules qu'ailleurs? Je n'en sais rien, et pour tout vous dire, nous n'avons que droit à l'observation, et absolument pas à l'expression. Nous en faisons notre mot d'ordre partout où nous allons, n'y étant que de passage, impossible de nous impliquer dans une quelconque opinion.


 
© Droits réservés 2012 : etoiledelune.net | Article rédigé par Nathalie - Mise en page de Dominique