Fiche Météo et aide à la navigation
pour la région comprise entre le Panama et les îles ABC
du 8°Nord au 13°Nord et du 68°W au 78°W

 

Remerciements

Nous tenons à remercier tout particulièrement l’équipe du Réseau du Capitaine. Chaque matin ils sont infailliblement présents sur les ondes. Sur la fréquence du 14 118KHz, ils nous apportent non seulement une aide à l’interprétation météorologique précieuse, mais en plus ce rendez-vous quotidien fait du bien au moral lorsque la mer et le vent se mêlent de nous compliquer la vie...

Région concernée

Nous traitons les navigations entre les îles ABC (Aruba, Bonnaire, Curaçao) et le Panama, avec une navigation côtière sur la Colombie et dans le Golfe Darien. Les navigations sont aussi bien envisagées dans le sens est-ouest, que dans le sens de retour vers l'Est. Cette région est soumise à 2 types distincts de flux et d'influences. Elle mérite une attention particulière lors de vos navigations.
Cet article ne se réfère pas uniquement à une expérience en particulier. Il reprend aussi toute la littérature nautique, les archives météorologiques basées sur plusieurs années et les témoignages de bateaux habitués à fréquenter la région.

Nous insistons particulièrement sur le fait qu'une navigation dans le sens ouest-est ne doit pas être envisagée à la légère. Elle comporte nombre d'embûches à la clé. Vous y trouverez déplaisir, découragement et casse de matériel, une navigation qui n'a décidément rien à voir avec le mot "plaisance". Pour ceux qui seraient tentés par l'expérience vous trouverez dans ce document toutes les informations nécessaires. Sachez d'emblée que pour ce type de navigation, il faut en plus d'un bon bateau qui remonte très bien au près serré, un moteur puissant pour appuyer les voiles dans des courants contraires qui ne sont pas à négliger. Prenez en compte aussi, que les fenêtres météorologiques n'offriront que rarement la possibilité de rallier un point à l'autre dans des conditions clémentes d'un bout à l'autre. Plus que de l'endurance, c'est une réelle épreuve de patience.

Quant aux bienheureux qui vont vers l'ouest, il y a sur ce parcours des écueils à éviter, nous vous les livrons en détail.

Particularités climatiques

Positionnée dans le sud-ouest de la mer des Caraïbes, cette région pourrait sembler aussi facile et navigable que l'Arc antillais. Il est vrai qu'elle est soumise, à un régime d'alizé, de plus n'étant pas dans la région affectée par les cyclones elle pourrait paraître une zone de navigation idyllique.

Malheureusement la réalité sur place est tout autre. Au-delà des Roques ( archipel du Venezuela) et en entrant dans le territoire maritime des ABC, les alizés sont chez eux et ils font ce qu'ils aiment le plus : souffler... Et souffler sans relâche ! Ces conditions sont causées par la dépression qui stationne en permanence sur la Colombie. Elle est conjuguée à l'influence de l'anticyclone de l'Atlantique qui entretient un resserrement perpétuel des isobares. En découle une accélation sensible des alizés. Accélération d'autant plus marquée par la configuration des montagnes de la Sierra Nevada de Santa Marta. Les montagnes grimpent à pic à plus de 5000 mètres. Ainsi vous naviguez à l'endroit exact où les effets d'anticyclones, de dépressions, de climat tropical chaud et humide, de climat montagnard sec et froid se rencontrent. Un cocktail détonant de vents forts toute l'année et d'orages en été !

Vous l'aurez compris d'emblée entre le 69°W et le 75°W le long du continent sud-américain, les fenêtres météo sont rares et lorsqu'elles se présentent elles ne sont pas minces, elles sont anorexiques ! Elles se referment même parfois avant de s'être ouvertes. C'est-à-dire qu'il n'est pas rare d'avoir une prévision à 3 jours annonçant une baisse des vents mais que 72 heures plus tard non seulement les vents n'aient pas faibli, mais qu'en plus ils se soient renforcés... Un vrai casse-tête que de trouver le bon créneau dans la région.

Les composantes à surveiller avant de partir

Les vents

Dans la région, vous aurez droit à un vent en général supérieur à 20 noeuds. Entre le 70°W et le 75°W les vents enregistrés sont en moyenne de 25 noeuds pendant plus des trois quarts de l'année. Ce sont des moyennes. Il n'est donc pas rare de subir pendant de nombreux jours des vents soutenus autour de 30 noeuds. Dans ces périodes une petite phrase se répète inlassablement dans les bulletins prodigués par la Noaa : "SUN AND MON...N OF 11N E OF 78W NE TO E WINDS 15 TO 20 KT EXCEPT TO 25 KT NEAR COAST OF COLOMBIA INCREASING TO 30 TO 35 KT AREA WIDE MON. SEAS 9 TO 10 FT BUILDING TO 12 TO 16 FT MON NIGHT NEAR COAST COLOMBIA."
(Au nord du 11N et à l'est du 78W vents de 15 à 20 noeuds, excepté 25 noeuds sur les côtes de Colombie se renforçant 30 à 35 noeuds dans la région étendue lundi. La mer est de 9 à 10 pieds et se bâtit de 12 à 16 sur les côtes de Colombie.)
Extrait du bulletin AMZ84 diffusé par la Noaa, réception par BLU via winlink ou sailmail.

La mer
A ce vent s'ajoute une mer qui sera accélérée par des effets de courants subtropicaux et qui sera également raccourcie par des effets de cap et de fonds marins remontant brutalement. Pendant l'une de nos attentes de fenêtre météo à Cabo de Vela nous verrons des prévisions annonçant fréquemment autour de 15 pieds de vagues, nous avons également vu plusieurs jours au-dessus de 20 pieds annoncés avec un maximum de 24 pieds. Mer impraticable pour ceux qui remontent dans l'est, mer franchissable mais dure pour ceux qui naviguent au portant.

La fréquence des vagues
Les bouées météorologiques sont très précises en matière de fréquence de vague. Sur la côte de Colombie et dans la région d'Aruba il est rare de monter au-dessus de 7 secondes de fréquences de vague. Cela forme une mer très abrupte, car nous avons souvent droit à une mer minimum de 6 à 8 pieds avec une fréquence de 5 à 6 secondes. A 4 secondes, la mer est vraiment très courte et les conditions sont franchement mauvaises.

Le courant
Entre les îles ABC et le Cap de la Vela il y a une accélération du courant qui porte à l'ouest. Entre Aruba et la péninsule de Paraguana les courants sont particulièrement forts et poussent à plus de 2 noeuds vers l'ouest. A la sortie du Cap de la Vela le courant contre lequel vous devrez batailler en retournant vers les îles ABC dépasse à certains endroits 1,5 noeud. Lorsque le vent souffle à plus de 25 noeuds contre vous, chaque mille gagné se fait au prix de virements de bord laborieux.

 

Les cyclones
Du mois de juillet à fin novembre, les cyclones prennent pour terrain de jeu la mer des Caraïbes. La Colombie n'a pas connu de cyclone, mais elle peut en subir la houle. Les îles ABC sont au sud des phénomènes. La zone n'est pas complètement protégée, mais les phénomènes sont rares. Par contre, un cyclone qui traverse la mer des Caraïbes au niveau du 15°N voire plus haut fera baisser les vents sur la côte de Colombie. Il pourra peut-être même les annuler voire les infléchir à l'ouest...
Mais pour naviguer dans de telles conditions il faut compter sur le malheur des autres et sur la chance pour vous car ces phénomènes restent imprévisibles en force et en direction ...

Les orages
Ils concernent la zone côtière de Colombie et du Panama ainsi que tout le golfe Darien. La saison des orages débute en mai et se finit début décembre. L'influence de ces orages n'est pas à négliger. En juillet 2008, dans la même semaine nous avons eu deux bateaux amis qui ont pris la foudre. L'un était à San Bernardo, l'autre aux San Blas.

A partir de fin avril, début mai commence la saison de "los culos de pollo", expression triviale utilisée par les Colombiens qui signifie "cul de poulet". Le temps est généralement lourd, sans trop de vent. Le ciel est chargé; en une fraction de seconde, le flux d'air passe du NNE au SSW. Les bateaux pris à contre par le flux d'air contraire pivotent rapidement, le vent passe de 0 à 45, voire 50 noeuds, sans prévenir. Les dérapages sont fréquents surtout dans les zones de mouillage de mauvaise tenue type Carthagène. Le phénomène peut durer une heure, rarement plus longtemps. Ces "culos de pollo" ne sont pas très forts en mai, les vents ne dépassent pas 30 à 35 noeuds. Puis au fur et à mesure de la saison qui s'avance, les vents subis sont de plus en plus violents. Les culs de poulet les plus forts se situent en septembre et octobre, puis s'affaiblissent en novembre, pour totalement disparaître en décembre.

L'anticyclone
En période de hautes pressions au Nord-Est de la région Caraïbe, les alizés seront soutenus, forts voire violents. Un anticyclone à partir de 1026 HPa vous contrariera, à 1030 HPa, voire plus, il deviendra votre pire ennemi. A partir de valeurs telles que 1024HPa et moins, les conditions seront déjà plus acceptables. S'il pouvait disparaître, la fenêtre vous serait ouverte en grand!

Les fronts froids
Les fronts froids qui traversent le nord de la mer des Caraïbes seront par contre vos alliés. S'ils sont assez forts pour contrecarrer l'influence de l'anticyclone, ils feront baisser les vents, mais ils ne les feront mourir que très rarement...

Les périodes de navigation

De décembre à mi-avril
Les vents les plus forts soufflent entre décembre et mi-avril. En saison d'alizés particulièrement forts il est arrivé que le Cabo de Vela se révèle, dans le sens ouest-est, infranchissable même pour des bateaux fortement motorisés.Soyons francs, il est des choses qu'il ne faut pas faire en mer! N'envisagez pas de navigations dans le sens ouest - Est entre Panama et les îles ABC dans la période d'hiver.

Quant à la navigation en sens inverse, elle sera faisable dans certaines conditions. Essayez en règle générale d'éviter cette période-là. Pour vous dissuader d'un voyage dans le sens ouest - est en hiver voici un exemple et deux avis éclairés.

Nous avons rencontré un yacht de type "hatteras" le "Lady O", muni de deux moteurs de 1550 chevaux qui a connu de telles conditions au Cap de la Vela qu'il a dû rebrousser chemin.

Dans l'excellent ouvrage de Pat et John E. Rain : "Cruising Ports : Florida to California via Panama (and vice versa), vous trouverez cette petite phrase édifiante.

"During the winter months, the Northeast trades blow their strongest across the Caribean. Offshore of la Guajira Paninsula (the northern-most tip of South America), the trades often blow at gale force for days. (...) For 99.9% of all yachts, espacially sailboats, this route is virtually impossible in winter." (Durant les mois d'hiver, les vents de NE soufflent à leur maximum sur la Caraïbe. Au large de la Guajira (Cabo de Vela) les alizés soufflent souvent à force de tempête. Pour 99.9% des bateaux et spécialement les voiliers cette route est virtuellement impossible en hiver.

Sachez avant même de lire la suite, ce que Jimmy Cornel, le "gourou" des navigateurs précise dans son ouvrage "les routes de grande croisière" : "Cette route est difficile, voire impossible durant l'hiver, où il est difficile d'aller contre les vents dominants de NE ou d'est, il faut donc mieux effectuer ce trajet au changement de saison. On peut trouver de meilleures conditions au début de l'été, quand les alizés ont une composante sud, ce qui aidera quelque peu à tirer des bords. A toute autre époque de l'année, il n'y a malheureusement pas d'autre choix qu'une pénible remontée au près et cette difficulté incontestable doit être sérieusement prise en compte avant d'inclure cette route dans son programme de navigation. (...)On aura besoin de cartes détaillées ainsi que d'un bateau qui remonte bien au près et d'un équipage endurant."

A Eviter également : les mois de juin - juillet

Nous avons test é dans le sens ouest-est ces deux mois. Ils sont très mal choisis et je vous suggèrerais d'éviter également ces deux mois-là. En effet, ce sont les mois où l'anticyclone de l'Atlantique est vraiment en pleine forme. Stationné au beau milieu de l'océan et poussant des dorsales vers l'ouest il génère des resserrements quotidiens d'isobares. Aucun front froid ne vous viendra en aide, ce n'est plus leur saison. La dépression colombienne quant à elle ne faiblit pas non plus, on est au début de la période orageuse, et le cocktail colombien ne se marie pas du tout avec un retour vers l'est à cette période-là.

Tandis que deux voiliers tenteront le passage de Barranquilla, mais seront refoulés après plusieurs tentatives, nous mettrons plus de 2 mois à passer de Santa Marta à Aruba avec une attente de plus de 50 jours à la Guajira dans des mouillages exposés au vent de 30 noeuds permanents.

Nous reviendrons plus bas dans ce dossier sur les conditions de navigation et de mouillage dans la péninsule. Voir rubrique "stratégie pour revenir dans l'Est".

Fin avril - début mai

Au moment du basculement de saison. Lorsque l'anticyclone n'est pas trop vaillant et que les fronts froids passent encore, il y a des possibilités de fenêtres météo dans la zone. Elles ne seront jamais très longues. Il faudra profiter de la moindre baisse. Rester aux aguets pour le moindre moment favorable. Surtout avancer le plus vite possible et ne jamais traîner en route. Les fenêtres commencent au plus tôt fin avril et finissent vers la fin du mois de mai. Selon les années vous bénéficierez de plus ou moins de jours d'accalmies. Vous trouverez au mieux 48 à 72 heures de vents inférieurs à 20 noeuds et de mer inférieure à 6 pieds. Il faut garder à l'esprit que ces conditions sont vraiment exceptionnelles et qu'elles ne se présentent pas systématiquement.

Dans le sens est-ouest, le mois de mai, n'est peut-être pas très judicieux. En effet, vous vous retrouverez aux San Blas pour le début de la saison des orages, elle ne s'achèvera qu'en décembre.

Par contre dans le sens ouest- est, c'est LE bon moment pour revenir vers l'Est. Vous évitez ainsi les orages du Golfe Darien et sur la route vous n'aurez pas à subir le réveil des alizés entre juin et août.

A partir du mois d'août
La prochaine fenêtre météo pour s'aventurer dans le sens Ouest - Est commence vers mi-août, lorsque l'anticyclone montre des signes de faiblesse et que les ouragans créent une ceinture de protection contre ses dorsales. Elle s'achève avec le réveil des alizés vers la mi-novembre lorsqu'ils sont précoces. Vous aurez à composer avec les orages et les cyclones qui selon le cas pourront vous aider en vous amenant des vents d'ouest. Mais naviguer dans les orages n'est jamais très plaisant.

Octobre-Novembre
Pour ceux qui viennent de l'Est et qui aspirent à découvrir les San Blas, une période navigable se trouve avant le réveil des alizés et après la saison des orages. C'est donc à la jonction entre fin octobre et fin novembre. Surveillez la saison orageuse et partez des îles ABC à la fin de celle-ci. Le mois de novembre vous permettra de vous balader entre Cabo de Vela et Carthagène sans trop de problèmes. Vous arriverez tranquillement sur Carthagène au début de décembre, les fêtes de Noel y sont splendides. Attention toutefois car en décembre les alizés sont déjà bien réveillés. Il faut de toute manière surveiller les prévisions météo et avancer en connaissance de cause. Mais cette période est à mon avis la seule où vous pourrez profiter des mouillages de Cabo de Vela, des 5 baies, sous leurs bons jours.

Prévisions météo

Sachez que dans la région, les prévisions météorologiques sont peu fiables. Quand les alizés sont établis, vous pouvez sans complexe ajouter 10 à 15 noeuds de vent aux prévisions. En saison d'orages, ceux-ci sont si soudains qu'on a bien du mal à prédire où ils tomberont avec précision.
Dans la période de transition entre les orages et les alizés, vous trouverez des conditions acceptables, voire conformes aux prévisions.

Stratégies de navigation dans le sens Est-Ouest

Entre ABC et San Blas via Carthagène et les archipels colombiens, voici les étapes importantes :

ABC - Cabo de Vela - les cinq baies - Rodadero - Punta Hermosa - Carthagène - Rosario - San Bernardo - Fuerte - Sapzurro - San Blas

Cabo de Vela : 12°12N 72°10W

A partir de Curaçao vers Cabo de Vela la navigation représente 210 milles. A vous de juger ce que vous pouvez supporter, mais au départ des ABC vous ne prendrez jamais la mer lorsqu'il y a plus de 25 à 30 noeuds de vent soutenus aux îles ABC, ces conditions rendent le Cap de la Vela dangereux. Même en vents portants.

Conditions de mouillage.
Dans le sens est-ouest, et en automne avant les alizés, vous pourrez profiter pleinement du Cabo de Vela. Ce sera le seul moment où les vents seront relativement cléments pour mouiller et bénéficier de quelques randonnées à terre dans le désert. A toute autre période le fetch permet la formation de vagues qui peuvent vous empêcher de descendre à terre. Cabo de Vela est une baie très large où il est quasiment impossible de s'avancer. Le repère à prendre, c'est la hutte de Maria Louisa "Yo So Lu". C'est une petite hutte, dont le patio se ferme grâce à des rideaux de coquillages. Le nom de la tienda est gravé dans du bois. Ne dépassez pas cette limite, il n'y a rapidement plus de fond. Ne vous rapprochez pas trop du rivage, mouillez à 400 mètres du rivage. Position : 12°12 169N 72°10 430W. Ne dépassez en aucun cas cette limite. Ne tentez pas non plus d'aller dans le fond de la baie vers le village principal, même en annexe certains endroits sont trop peu profonds.

Guairaca : 11°20N 74°06W

La navigation entre la péninsule de la Guajira et Santa Marta n'est pas compliquée. La mer est moins forte à mesure que vous vous rapprocherez du continent.

Le mouillage de Guiraca est joli et agréable à l'oeil. Cependant il est sujet à des rafales fréquentes et à une houle longue qui pénètre dans la baie par vent de NE. Des quatre autres baies de la région, seule Nenguange est praticable. Mais attention, elle est parsemée de nombreux récifs, et la houle peut être particulièrement importante. Reste Bahia Concha, celle-ci retient la palme des rafales. Elles passent de 0 à 30 noeuds en quelques secondes et se répètent toutes les 2 minutes, c'est abrutissant! La baie cinto est chasse gardée d'une riche famille de Bogota. Dommage ce serait celle qui offrirait le meilleur abri.

Par contre en novembre, lorsque la météo ne vous presse pas trop, il serait dommage de rater le mouillage de la Guairaca. Randonnées en forêt tropicale, sites précolombiens, paysages à couper le souffle vers Neguange, visite de Santa Marta... Il y a fort à faire dans les parages. (référez-vous au guide de la Colombie disponible en PDF)

La navigation pour Rodadero ne pose aucun problème. Assurez votre météo en partant. Vous trouverez les détails sur le mouillage de Rodadero dans le guide sur Colombie disponible sur les sites suivants :
http://www.etoiledelune.net
http://www.lereseauducapitaine.qc.ca/Carnets.html (rubrique carnets de l'Etoile de Lune)

Barranquilla
La prochaine étape qu'il faut soigner est le passage du fleuve Magdaléna.

Rares sont les marins qui oublient la pointe de Baranquilla!
À Baranquilla, vous trouverez les effets de cap, de fonds marins et de remontées abruptes conjugués. S'y ajoutera en plus, l'effet de courant généré par le fleuve Magdaléna. Il déverse une eau opaque chargée, en saison des pluies, de déchets genre troncs d'arbre. Le courant généré par le fleuve se propage en entonnoir depuis la côte vers le large. Ce courant qui porte du sud vers le nord-ouest et le nord-est contrarie le courant subtropical dominant qui porte vers le sud-ouest. En cas de mer formée les effets de remontée de fonds et les effets de courant vous donneront une mer particulièrement désordonnée où les vagues montent comme des murs.

En période de pluies, le fleuve Magdaléna charrie de gros troncs. Il est important de passer l'embouchure du fleuve par temps clair et de jour. Attention, par mer forte, l'eau qui est brunâtre, les vagues qui déferlent vous empêcheront d'éviter ces objets flottants non identifiables. Soignez également la météo sur ce passage et vérifiez que vous ne soyez pas en période d'accélération des vents. Tentez de le passer par moins de 20 noeuds de vent. En aucun cas ne passez Barranquilla lorsque les fichiers météo vous annoncent une saute de vent sur côte de Colombie.

Ce sont les fichiers AMZ84 délivrés par la Noaa

exemple de météo à éviter : "TUE AND WED FROM 11N TO 14N E OF 79W NE WINDS 15 TO 20 KT EXCEPT TO 30 KT NEAR COAST OF COLOMBIA. SEAS 6 TO 9 FT IN NE SWELL EXCEPT 10 TO 14 NEAR COAST OF COLOMBIA . "

L'astuce est d'éviter de se lancer sur ce parcours quand vous voyez cette expression " EXCEPT TO 30 KT NEAR COAST OF COLOMBIA"

Punta Hermosa


Après Baranquilla vous pouvez décider de mouiller à Punta Hermosa, cela vous permettra de planifier une entrée de jour à Carthagène. Attention aux fonds de Punta Hermosa, ils sont d'exécrable de tenue!

Descente sur Carthagène

Celle-ci ne pose aucun problème, vent portant, la mer peut être un peu forte lorsque les vents se lèvent plus haut. Mais ce n'est pas le passage le plus difficile de cette croisière.

Carthagène - San Blas (les Hollandes)

Pour ceux qui envisagent une route directe sur les Hollandes aux San Blas, la meilleure période pour effectuer ce trajet est le mois de décembre. Les orages sont finis et les alizés ne sont pas encore établis. Entre janvier et mi-avril, ce parcours sera plus sportif et la houle courte rendra la mer désagréable. En effet, au nord du 10° N dans le golfe ( latitude de l’archipel du Rosaire) les alizés forts dominent pendant toute la saison entre décembre et avril. Au-delà du mois d'avril on retrouve les orages et des vents variables.

Carthagène - San Blas ( via les archipels colombiens)

Pour les amateurs de Golfe, qui auraient traîné en route, ils peuvent tout au long de l'hiver trouver de bonnes fenêtres en descendant plus au sud et trouver l'archipel de San Blas via les archipels colombiens de Rosario, de San Bernardo et de Fuerte. Puis, ils traverseront sur Sapzurro, dernière ville colombienne.

Les vents sont souvent faibles à modérés en dessous du 9° 50 N et le long de la côte colombienne côté Est, c'est à dire dans une zone comprise entre le 75°30 et le 76°30. Là, vous trouverez les archipels de San Bernardo et de Fuerte. En navigation vous trouverez souvent une mer belle, toute cette zone étant protégée par la côte de Colombie. Seuls moments désagréables, lorsque les vents décident de souffler du SW, cela arrive en toute période avec des forces variables selon qu'ils soient engendrés par un orage ou de simples conditions thermiques, mais de toute manière vous serez rarement protégez au mouillage.

Au mouillage, lorsque les alizés ne prédominent pas, vous rencontrerez ces conditions thermiques. Le vent du sud « el viento » souffle pendant les heures chaudes de la journée, la légère brise du nord « la brisa » tamise les nuits. La belle période pour visiter le golfe Darien s'étale de janvier à fin avril. Chose surprenante, malgré que le temps soit sec, vous trouverez plus souvent un ciel laiteux qu'un grand beau ciel bleu et ce dans tout le golfe Darien y compris les San Blas.

Les San Blas via Sapzurro

Pour aller à Sapzurro, vous pouvez soit partir directement de San Bernardo, soit de Fuerte. Navigation de nuit pour 110 à 90 milles selon que vous partiez de l'un ou l'autre archipel. Sur ce parcours, vous pouvez, selon les conditions, rencontrer des vents de NW ou de NE, parfois également du SW. Le vent dominant étant plutôt de NNW. Sauf à croiser un orage violent les vents ne dépasseront que rarement 20 à 25 noeuds. Seul désagrément, les alizés qui soufflent fort au large de Carthagène propagent sur toute la moitié ouest du golfe Darien une houle erratique et disproportionnée par rapport aux vents dominants. Vous surveillerez donc les prévisions plus haut dans la zone Nord de Colombie.

La remontée de l'archipel des San Blas

Attention, la remontée de l'archipel des San Blas peut être sportive entre janvier et mars. Entre Spazurro et les îles Kunas, les vents soufflent du Nord Nord Ouest. Ce qui vous fait remonter l'archipel des Kunas contre le vent. Sachez qu'ils sont rarement supérieurs à 25 noeuds et restent plutôt établis autour de 20 noeuds. La mer est formée dans le fond du golfe dans ces périodes de forts alizés. Les périodes de vents soutenus peuvent durer plus de dix jours. Mais il y a tôt ou tard une fenêtre qui s'ouvre.

Stratégie pour revenir dans l'Est

Division météorologique de la croisière en trois zones.
San Blas - Carthagène, entre le 78°W et le 75° W : pas de difficulté majeure.
Carthagène - ABC , entre le 75°W et le 69°W : le parcours le plus difficile.
ABC - Venezuela, à partir du 68°W, via le continent sud-américain, les fenêtres météo sont, en été et jusque fin octobre plus nombreuses. Le parcours est toujours difficile, mais pas insurmontable. En hiver, il est déconseillé.

Nous traiterons ici les deux premières zones.

San Blas - Carthagène (via San Bernardo ou Fuerte et Rosario)

De Sapzurro : 08°39 N 77°21W à San Bernardo : 09°47W 75° 51W
Navigation : 135 MILLES
De San Bernardo à Roasario : 10°10N 75°44W
Navigation : 35 milles
De Rosario à Carathagène : 10°10N 75°40W
Navigation : 25 MILLES

Pour tous ceux qui sont dans les San Blas et qui désirent revenir sur Carthagène. Pas de problème. Il suffit de prendre la route sud, de faire sa sortie du Panama à Obaldia, de faire escale à Sapzurro, d'y attendre des vents faibles de Nord à Nord Nord Ouest. A sapzurro, il faut se méfier du mois de mai qui est le théâtre de tornades. Phénomène très sporadique et très court mais dont les effets peuvent être catastrophiques sur un bateau.

Autre option à partir des Hollandes dans l'archipel des San Blas, possibilité, par vents faibles en mai de traverser d'une traite. Mais les bateaux auront intérêt là aussi, sans passer par Obaldia et Sapzurro, d'infléchir leur route sous le 10° de latitude Nord. Voire de piquer sur San Bernardo plutôt que de s'acharner à rallier Rosario. Trop haut, les vents seront contraires, et vous êtes sur la route de cargos. Certains bateaux descendront l'archipel des SanBlas jusqu'à Pinos et de là ils viseront également San Bernardo.

Ces itinéraires ne devraient pas, avec une météo soignée poser de problèmes.

Carthagène - Guairaca (Santa Marta)
Guairaca : 11°20N 74°06W
Navigation : 130 MILLES

Si la fenêtre météorologique se fait trop attendre, il est assez facile de remonter de Carthagène à Punta Hermosa (environ 50 milles). Attention, il ne faut prendre cette option que si l'on est certain d'avoir rapidement une fenêtre et ce afin de se positionner à quelques milles du délicat passage du cap de Barranquilla. C'est le premier passage qui peut se révéler douloureux. Le mouillage est de tenue exécrable. Nous y avons dérapé avec plus de 70 mètres de chaîne. Vous pouvez mouiller dans le fond de la baie, devant les huttes touristiques. Prenez garde à ne pas mouiller trop près de la route. La sécurité n'y est pas assurée complètement. Les fonds dans le fond du golfe remontent rapidement. Il y a une grosse bouée d'amarrage, il ne faut pas dépasser celle-ci. L'aire entre cette bouée et la plage est réservée aux skysurfers. Autant de points qu'il faudra prendre en considération si vous choisissez de vous y arrêter.

Pour passer la pointe de la Baranquilla, soignez votre météo. La bonne stratégie est de prendre les cartes de la Noaa, de cibler 72 heures où la mer ne dépasse pas 5 pieds dans les prévisions et le vent ne dépasse pas 15 noeuds. Je vous rappelle que ces fenêtres sont excessivement rares. Mieux vaut le savoir avant de prendre la décision d'aller dans l'est. Elles existent au basculement de saison, fin avril et courant mai.

De Guairaca à Cabo de Vela.

Cabo de Vela : 12°12N 72°10W
Navigation : 150 milles.

Nous avons effectué cette navigation au pied levé. Je pense que c'est l'un des atouts majeurs de toute cette navigation : être prêts à partir dans l'heure. Le temps change très rapidement. En quelques heures à peine, le vent peut tomber de 35 à 15 noeuds, la mer par houle amortie ne présente plus d'obstacle. Il faut saisir ce type d'occasion et dans un retour vers l'Est disposer de toutes les données météo nécessaires et garder l'oeil dessus en quasi permanence. Il faut comprendre que sur ce trajet vous serez à l'abri du Cap de la Vela. Celui-ci est un véritable rempart contre la houle qui se comporte comme une avalanche. Elle s'établit fortement dès les îles ABC, elle bute contre le Cap Galinas, puis dévale le long de la côte de Colombie prenant toujours plus de vigueur et de hauteur pour atteindre ses maxima au large de Barranquilla.

Conseil IMPORTANT
A l'approche du Cabo de Vela, si les conditions sont toujours praticables, et même si elles ne sont pas idylliques, poursuivez votre route. La tentation est grande de s'arrêter, pour une nuit, mais elle peut vous coûter cher. Ce cap est une vraie calamité, dès que le vent s'y lève, on ne sait jamais pour combien de temps il est établi. Pour exemple notre expérience :

Nous atteignons le Cap de la Vela, le 26 mai 2008. La fenêtre se referme avec notre arrivée. Les dernières heures se passent contre le vent, nous appuyons les voiles au moteur, pour mouiller avec 26 noeuds de vent d'est, alors que pendant la navigation, nous n'avions jamais dépassé les 20 noeuds apparents. Nous patienterons dans des conditions innommables pendant 45 jours! Les prévisions météo nous donnaient inlassablement ce qui suit : "SUN AND MON...N OF 11N E OF 78W NE TO E WINDS 15 TO 20 KT EXCEPT TO 25 KT NEAR COAST OF COLOMBIA INCREASING TO 30 TO 35 KT AREA WIDE MON. SEAS 9 TO 10 FT BUILDING TO 11 TO 14 FT MON NIGHT."

Les mots "increasing" et "building" sont les plus courants dans les bulletins de la zone.

Rappel : Le Cap de la Vela est une baie très large où il est quasiment impossible de s'avancer. Le repère à prendre, c'est la hutte de Maria Louisa "Yo So Lu". C'est une petite hutte, dont le patio se ferme grâce à des rideaux de coquillages. Le nom de la tienda est gravé dans du bois. Ne dépassez pas cette limite, il n'y a rapidement plus de fond. Ne vous rapprochez pas trop du rivage, mouillez à 400 mètres du rivage. Position : 12°12 169N 72°10 430W. Ne dépassez en aucun cas cette limite. Ne tentez pas non plus d'aller dans le fond de la baie vers le village principal, même en annexe certains endroits sont trop peu profonds.

Gros désavantage de ce mouillage : Le fetch particulièrement long reforme un clapot important par vent de Sud Est. Le vent est présent en permanence. S'ajoute aux conditions un effet thermique à ne pas négliger. On comprend la présence d'une vingtaine d'éoliennes à proximité de Puerto Bolivar.

De Cabo de Vela à Bahia Honda
BAIA HONDA : 12°22N 71°45W
Navigation : 30 MILLES

Une accalmie de quelques heures nous décide à lever l'ancre et à mouiller dans Bahia Honda. Il nous faudra pas moins de 10 heures pour effectuer au moteur ce trajet. L'endroit n'est pas cartographié. Il avait été décrit par le bateau Pizazz dans le Compass, comme une escale possible. Il la déconseillait car elle n'était pas cartographiée, mais il disait avoir vu trois bateaux amis s'être arrêtés là, attendant de meilleures conditions sans se plaindre. Cette dernière phrase nous décida.

HORREUR. Le mouillage se présente telle une vaste mer intérieure. Il est totalement impossible d'avancer dans l'est du mouillage. Nous avons trouvé juste à l'aplomb du petit cap qui referme symboliquement le mouillage, moins de 1m60 d'eau. Le fetch y est encore plus important qu'à Cabo de Vela, en prime la houle du large contourne la pointe, et vient frapper le clapot permanent sous votre bateau. Le vent souffle à plus de 30 noeuds en permanence, nous étions forcés de fermer les capots, car au mouillage, la vague était tellement bien formée qu'elle passait par dessus le pont et pénétrait par les hublots.

Un repère pour vous, nous y avons plié notre ancre britanny. Celle-ci avait pourtant résisté au cyclone Emily, dans Port Egmond le célèbre abri anticyclonique de Grenade. Heureusement, nous mouillons toujours deux ancres. Une première, la brake de 25 kilos, puis laissons filer 15 à 20 mètres de chaîne, y empennelons, la britanny de 25 kilos, puis laissons filer 40 ou 50 mètres supplémentaires. Ces précautions n'ont pas été inutiles dans notre attente désertique de la Guajira.

De Bahia Honda aux îles ABC
Aruba : 12°30N 70°01W

Aruba, navigation de 105 milles en ligne droite.
Rajoutez au moins le double, et armez-vous de courage pour les incessants virements de bord. Le plus difficile est de déceler une fenêtre météo. Souvent le vent se calme sur ABC en premier, mais sur Cabo, le vent est encore trop établi dépassant les 30 noeuds. Le Cap de Galinas reste infranchissable alors que derrière les conditions sont meilleures. (Nous avons vu un bateau rebrousser chemin) Le pire c'est que lorsqu'à Cabo de Vela les valeurs sont enfin comprises entre 20 et 25 noeuds, c'est sur les ABC que ça souffle plus fort. Bref, un jeu de patience, qui émousse les nerfs des plus endurants!

En 61 heures on a parcouru 210 milles pour 105 milles en ligne droite avec une déplorable moyenne de 3 noeuds. A certains moments nous avons été tentés de nous aider du moteur et de viser un cap plus direct, la moyenne tombait alors à 1.7 noeud. Mer, vent, courant tout se liguent contre vous, vous aurez été prévenus!

Départ le 13 juillet à 18 H arrivée à 7 H du matin le 16 juillet avec un avis de tempête sur la zone ABC, une onde tropicale plus active que les précédentes développera beaucoup plus au Nord l'ouragan de classe 1 Dolly. Nous passerons miraculeusement au travers des orages.

En arrivant à Aruba, c'est la première fois en 55 jours que L'étoile de Lune retrouve un plan d'eau plat. Une eau claire, un mouillage abrité.

Est-ce que ça vallait le coup????
A vous de voir...

Adresse utile pour la collecte des bulletins météo

Nous vous rappelons que pour vous faciliter la tâche dans la récolte de bulletins météo, nous avons créé sur notre site internet www.etoiledelune.net une page qui regroupe toutes les prévisions météorologiques pour l'Atlantique Nord. D'un seul clic vous disposerez de toutes les cartes de vents, de vagues à 24, 48 et 72 heures ainsi que les vues satellites de la zone Caraïbe et Atlantique. Vous consulterez aussi, les bulletins élaborés par winguru, la Noaa, Mété France, Ti bleu, SXM...

Pour un accès directe : http://pagesperso-orange.fr/etoiledelune/divers/meteo_locale.htm

Une fois que vous êtes partis au large, écoutez le réseau du capitaine sur le 14 118 KHZ. Ce réseau donne chaque matin une météo détaillée de l'arc antillais. D'autres moyens de collecter les bulletins météo sont détaillés dans un document spécialement conçu à cet effet et que nous tenons à votre disposition au lien suivant : http://s121758490.onlinehome.fr/edl/pdf/meteo_a_bord.pdf

Escales sur la route

Pour les escales sur la route référez-vous aux guides sur les îles ABC, la Colombie et Panama disponibles en versions PDF soit sur le site du réseau du capitaine, soit sur le site internet aux liens suivants :

http://s121758490.onlinehome.fr/edl/pdf/index.html

http://www.lereseauducapitaine.qc.ca/Carnets.html

Sources et bibliographie : Cornell et surtout observations personnelles et relevés météorologiques lors de nos croisières dans le bassin Colombien.


Toutes les informations ont été mises à jour en août 2008
Texte : Nathalie Cathala - Photos : Dominique et Nathalie Cathala. Tous droits réservés.
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