Aujourd'hui, 10 avril 2006 - Mail 47
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Zone de navigation : Archipel guadeloupéen

L’Elixir du Voyageur…..

« L'essentiel n'est pas de vivre mais de bien vivre ». Platon

Après le Carnaval de Fort de France, nous testons la nouvelle garde-robe de l’Etoile de Lune. Notre foc fait des miracles dans l’alizé de Nord-Est. Nous remontons vers l’archipel de la Guadeloupe. Nous découvrons Marie-Galante, l’île aux cent moulins, qui ne sont plus que 70. Marie-Galante nous ravit par sa qualité de vie et la diversité de ses paysages. Nous musardons à l’envi au fil de ses champs de cannes. Ceci est le premier mail d’une trilogie consacrée à l’archipel de la Guadeloupe.


Bonjour à tous,

A la fin des festivités de carnaval, l’Etoile de Lune lève l’ancre. Elle est impatiente de regagner la mer, et surtout d’essayer sa nouvelle garde-robe ! Sortie de la protection de sa Majesté la Pelée, notre Etoile fait front dans 25 nœuds d’alizés de Nord-Est. Le canal de la Dominique, fidèle à sa réputation, transforme l’Etoile en machine à laver à bascule. Ces conditions sont idéales pour essayer le nouveau foc ! Il est à poste sur son étai largable et n’attend plus que notre bon vouloir pour faire ses preuves. Envoyée promptement en pied de mât par mon Capitaine, le foc est hissé rapidement. Le réglage de cette voile est facile. Le Capitaine à la barre maintient l’allure au plus près serré du vent et déjoue l’effet des courants. Quel bonheur ! Nous sommes admiratifs de la marche du bateau. Notre Etoile, habituellement pataude dans les allures de près remonte si bien au vent, qu’il faut abattre pour passer la pointe Sud de la Dominique. Fait rare, nous gardons un vent suffisant pour continuer sous foc et grand voile haute, sous le vent de l’île. Nous nous arrêtons néanmoins au Nord de l’île pour 24 heures. Le vent fraîchit à 35 nœuds dans le canal des Saintes. Nous étions d’accord pour la machine à laver, pas pour la bouteille d’orangina… Un jour de patience, et nous voici déjà face à Pointe-À-Pitre et là… le charme d’une navigation sous foc perd soudain tout son charme ! D’ailleurs, soyons clairs ! Le foc et moi nous sommes copains en navigation et c’est tout ! L’idéal serait, qu’une fois envoyé, nous ne nous arrêtions plus ! Car il y a toujours ce moment fatidique où il faut l’affaler. Il faut une volonté surhumaine pour que cet intrépide ne se jette pas à l’eau ! Une fois raisonné (le foc !) et affalé (c’est le cas de le dire !) comme une pauvre chose sans formes sur le pont, ce balluchon ne pense qu’à une chose : remonter ! C’est à ce moment que l’on entend les ordres clairs et nets du Capitaine (c’est son rôle !) : « Mais ficèle le ! » Il a tout à fait raison ! Seulement, 30 mètres carrés de toile qui se débattent nez au vent ne se laissent pas faire comme ça et je ne m’appelle pas l’inspecteur gadget ! Dommage ! J’aurais bien pris l’option rallonge de bras ! Je finis par cabrer la bête et voici le foc ficelé  dans ses allures les moins glorieuses aux filières. Je peux mieux, faire, c’est sûr ! Promis, je m’y attèle !

Pendant ce temps, le Capitaine, GPS en main, surveille sa route parmi les balises de signalisation, les récifs à éviter, et l’entrée du chenal pas évident à trouver car la visibilité est très mauvaise. Malgré le vent établi, une brume de sable nous cache la plus grande partie de la Guadeloupe. Le bateau se faufile entre les bouées rouges et vertes qui marquent l’entrée vers Petit cul de sac du Marin. En revenant dans le cockpit je trouve la mine du Capitaine peu enjouée. Il me dit : « Au fait, qu’est-ce qu’on est venu faire à Pointe-à-Pitre ? » Je suis son regard bleu, dubitatif. L’étrave nous conduit droit sur un troupeau de girafes en acier bleu, elles s’amusent à élever un énorme mur de legos multicolores. Traduction : le mouillage d’îlet Cochon, d’où nous projetions de visiter la Guadeloupe, est tapissé d’un mur immonde de containers que des grues déplacent ou chargent dans des cargos. Ceux-ci passent à quelques mètres du mouillage. Il semble évident que nous n’abordons pas la Guadeloupe par son meilleur versant…

Nous relevons l’ancre rapidement et mettons le cap sur Marie-Galante. Nous ne tournons pas définitivement le dos à la Guadeloupe. Nous y reviendrons par le petit bout de la lorgnette. Le vent est avec nous, il nous permet de rallier l’île sur un seul bord. Des copains… des dauphins nous ouvrent la route. Nous arrivons à l’Anse Canot par beau soleil. L’éblouissement est au rendez-vous ! Le mouillage est réputé rouleur, mais les conditions météo idéales nous permettent d’y rester plusieurs jours. A chaque instant, nous puisons bonheur simple, tranquillité délectable, luminosité parfaite. Que vous dire ? Il est des moments, où la météo s’harmonise si parfaitement avec le cadre, qu’ils deviennent l’élixir du voyageur ! Nous logeons devant l’une des plus belles plages de l’île. La plage Moustique. Puis, nous nous rendons le matin tôt à Saint-Louis, la troisième ville de l’île en nombre d’habitants. Nous y trouvons une boulangerie qui nous permettra d’améliorer l’ordinaire qui se passe souvent de pain. Mais d’abord, nous musardons dans les ruelles. Il est 7H30 du matin, et tous les commerces sont déjà ouverts. Je photographie les vieilles cases en bois. Marcel nous interpelle : « alors, on ramène des souvenirs de Marie-Galante… » Il a le sourire large et franc des gens heureux. Il nous parle un peu et nous dit : « c’est bien, profitez, ici ça s’appelle Temps et Romance. » Je ne comprends pas tout de suite, et il ajoute : « c’est votre Métro-boulot-dodo » Puis il part d’un grand éclat de rire qui se propage dans la rue. Nous restons là sur le trottoir laissant la phrase résonner dans notre conscience de la vie. Un grand bruit attire notre attention, la navette arrive de Guadeloupe. Marcel, ses complices et des jeunes filles se précipitent sur le quai. Ils sont tous munis de pancartes : « tour de l’île » ou « véhicules à louer ». Saint Louis est en ébullition, le flot de touristes débarque sans prendre garde à l’accueil des Marie-galantais. Ils se ruent dans la boulangerie tel un essaim d’abeille sur la dernière réserve de nectar avant l’hiver. Saint-Louis, la paisible, bout, les habitants trépignent et cueillent les touristes à la sortie de la boulangerie. En un battement de cil tout le monde est casé dans le bus, les taxis collectifs, les voitures de location et les scooters. Un brouhaha éphémère balaye toute cette agitation hors de la ville. Par contre, il emporte aussi les 4 quiches, les 4 rouleaux aux saucisses, les quelques pâtisseries et le pain de la boulangerie ! Il semble évident que l’équipage de l’Etoile de Lune a perdu les réflexes métros et soit un peu trop gagné par le « temps et la romance ! »

Nous cherchons, nous aussi à faire le tour de l’île, mais pas en une matinée. Nous voulons nous imprégner des 157 kilomètres carrés de l’île, ramener dans cette fabuleuse boîte à image que seront nos souvenirs, des panoramas inoubliables et prendre le temps d’écouter l’île vivre. Randonnées pédestres, excursions diverses nous permettent de découvrir tous les charmes de Marie-Galante. Surnommée la galette, elle paraît plate vue du large, cependant l’intérieur de l’île offre une certaine variété de paysages. Il suffit de quitter les rivages où l’eau translucide nous éblouit toujours, et de s’aventurer dans la campagne verdoyante. Les paysages champêtres, ont élu pour reine, la canne à sucre. Elle frise l’air d’un bruissement qui souligne le silence. A l’ombre des arbres, des bœufs, des zébus, des chevaux, des cochons noirs attendent leur destin. Dans les sous-bois des pixels de lumière brasillent sur le feuillage. Une odeur d’humus chatouille les narines. Sur les routes, nous croisons des charrettes remplies de cannes tirées par des bêtes de somme. Ici, la tradition n’est pas un jeu exhibé le temps du passage d’un car de touristes. L’île vit à un autre rythme, elle vit en dehors de la course du temps. Chemin faisant, de ravines en mornes, nous crapahutons au cœur même de l’histoire de l’île. Les moulins de pierres restaurés ou mangés par le figuier maudit, en sont les gardiens. Ils veillent avec prestance sur la canne à sucre, c’est le seul rôle qui leur soit encore alloué puisqu’ils ne la broient plus. Marie-Galante est l’île idéale pour les marcheurs curieux ! Au détour des chemins, les ruines d’habitations sucrières gardent un charme particulier, celui-là même qui imprègne l’île tout entière. Toujours plus à l’Est nos pas nous entraînent vers le rivage qui barre la route à l’Océan… Marcel de Saint Louis prétend que « l’Océan, de l’autre côté de l’île, n’a rien à voir avec la Caraïbe qui baigne son village ! » Aujourd’hui, la météo donne raison à Marcel. De ce côté de l’île, la mer est déchaînée, hargneuse, hostile. La Caraïbe, ce matin, était douce, aux reflets de joyaux, translucide. Plus au Nord, les falaises retiennent les rouleaux de l’océan, des particularités géologiques ont créé des arches, des « cayes plates », des « kay à lombrik» (cayes rondes comme un nombril)… Certains panoramas sont vertigineux. Le regard s’offre un plongeon le long des flans de la falaise calcaire et s’arrête net sur l’eau translucide aux couleurs magiques qui font briller les yeux !

Repus d’images nous rentrons au bateau. Le soleil se couche derrière Basse-Terre. Les Saintes se parent d’un manteau sanguinaire… d’île en île nos souvenir et le présent se mêlent… clin d’œil à l’île de Beauté…

Je déteste plagier, mais Laurent Voulzy a raison, Marie Galante est une belle île en mer !

Amitiés marines
L’Etoile de Lune

L’album photo de Marie-Galante vous attend sur le site ainsi qu’un article riche en anecdotes historiques.

Texte écrit par Nathalie Cathala et mis en page par Dominique Cathala en avril 2006


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