VANUATU : Port Vila sur l'île de Efate

EFATE Au nord de l'île

VANUATU Jeune chaîne volcanique

Des îles volcaniques toujours en activité

VANUATU Population mélanésienne

Ni-Vanuatu : Enfants de l'île Pentecôte

Traditions et coutumes encore trés présentes























La vie va d'étonnements en surprises...



Lettre d'escale 102– écrite en juin 2012
Nombres de milles parcourus : 21 700 milles
Nombre de visiteurs sur le site : 860 000
Nombre de personnes inscrites à la lettre : 1150
Récit: VANUATU



Cap à l'ouest vers de nouveaux horizons

"Ne gâche pas ton temps pour l'impossible, et si tu peux le trouver, tant mieux... Mais tu verras que tout est résolu lorsque tu te passes des choses superflues."
Le livre de la jungle


Rendez-vous habituels

Sur le Blog :
voyage.nat-et-dom.fr/ - Vivez en direct notre quotidien au Vanuatu, pays aux 115 langues et aux 115 coutumes, toutes plus étranges et spectaculaires les unes que les autres.

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Sur notre site internet : http://www.etoile-de-lune.net

Deux albums photos dépaysants L'île de Pentecôte et La cérémonie des 7 pirogues


EN FIN DE MESSAGE :

Les photos du mois : Photo 1 - Signification de Vanuatu et Photo 2 - le repas des guerriers.

Projets à venir pour l'équipage et le bateau : du renouveau dans nos vies.



Résumé


Chaque journée s'ouvre sur de nouvelles découvertes

Le voyage est une drogue. Il donne envie de voyager plus. Il donne des ailes à notre vision du monde, il nous pousse aux extrémités des carcans de nos pays d'origines. Il offre une prise de conscience sur notre Terre, sur les êtres qui sont partie intégrante du kaléidoscope des sociétés qui la compose. Au Vanuatu, nous tombons dans un autre monde. Nous nous réveillons chaque jour comme s'il était le premier. Nous découvrons un peuple aux pratiques claniques, aux coutumes insolites, aux rites incompréhensibles aux néophytes que nous sommes. Il suffit de pénétrer une île, de vivre quelques jours avec les insulaires pour réveiller une fascination qui frise l'envoûtement. La curiosité s'aiguise à chaque découverte!


Cette escale est un voyage unique vers la quintessence de l'humain.



Bonjour,


Dans l'archipel du Vanuatu

Je ne vais pas débuter cette lettre par la description traditionnelle de la traversée océanique entre Wallis et Vanuatu. Elle s'est passée comme toutes les précédentes, rien de nouveau au large Pacifique, et je suis impatiente de partager avec vous, nos premières impressions sur le Vanuatu.


C'est, je pense, l'escale la plus étonnante de ce voyage. Etonnante par le choc culturel qu'elle nous apporte. Une leçon de vie de plus, une manière de voir notre monde au-delà de l'imaginable. Parfois, il nous faut tout oublier pour ne pas juger !


Depuis que nous sommes arrivés, le 8 juin, nous avons établi notre « quartier général » à Port Vila. C'est une ville très désordonnée, voire d'une architecture anarchique. En perpétuelle évolution, elle cherche à attirer les capitaux étrangers. Depuis Tahiti, soit le mois d'avril, nous n'avions plus été mêlés à une circulation vrombissante. Nous replongeons dans une ambiance urbaine, mais pas celle que vous imaginez : théâtre, magasins, opulence... Rien de tout cela n'existe vraiment. Quoique... Le bruit des voitures et des marteaux piqueurs est universel dans toutes les villes de notre chère et belle Planète.


Port Vila : capitale du Vanuatu

Ne vous y fiez pas, l'ambiance de cette ville est unique au Vanuatu. Seuls 20% des Nivans ont décidé de quitter leur « jardin des îles » pour tenter leur chance à la capitale. Aucune autre des 82 îles de l'archipel ne porte en son sein une ville aussi trépidante. Les Nivans, nous disent : « ici, c'est un petit coin d'Europe, vous y trouverez de tout. » Je n'aime pas contredire mes hôtes, mais Port Vila n'a rien à voir avec une ville, même de Province de notre cher vieil Occident sur-développé. Par cette comparaison, ils entendent que c'est le seul endroit, où l'électricité publique et l'eau courante desservent les maisons. Tout le reste du Vanuatu est plongé dans l'obscurité la plus totale.


Quelle surprise, lors de notre dernière nuit de navigation, de voir cette terre noire, dans l'éclairage glauque d'une lune se débattant dans la zone de convergence. Etrange sensation, presque lugubre que ce rivage sans lumière!


Robes colorées actuelles

A Port Vila bien que le tourisme tente de se développer, nous ne sommes pas attirés par les infrastructures nouvelles, les quelques restaurants « à la française » nous voient bien entendu... mais ce qui nous fascine, c'est le marché. Les femmes prennent possession de leurs étales le lundi matin et ne les quittent que le samedi midi. Jour et nuit, elles gardent la production de leur « jardin » et la vendent. Une vie de corvée, où chaque jour, elles resplendissent dans leurs « Mother's dress » (robe de mama) colorées, avec de grands pans de tissus externes qui leur donne l'allure de « bouffons du Roi », du temps du Moyen-Âge. Ces femmes sont assises par terre, sur des nattes colorées, tissées par leurs soins dans le pandanus. A longueur de nuit et de journées elles sont là. Elles nourrissent au sein, ou à la noix de coco, leurs enfants qui les entourent en marmailles bien sages. Elles attendent le client, esclaves de leur situation, emprisonnées entre des étales regorgeant d'ignames, de taros, de fruits, et légumes. Nous y découvrons aussi, les énormes crabes de cocotiers aux reflets bleus.


Seules les femmes travaillent au marché. Les hommes travaillent peu, ou seulement lorsque leur force physique est requise. Sinon, les femmes font le reste... Et ce reste, c'est énorme! Je me demande d'ailleurs, mis à part empocher les bénéfices, ce qui peut bien requérir la force si colossale de leurs hommes? Abattent-ils des arbres de fer géants ?... Mais en pleine ville j'émets quelques doutes.


Au marché de Port Vila

J'aurai l'occasion au cours de notre séjour de vous reparler des pratiques patriarcales de la société nivane... De quoi dresser des fronts entiers de femmes du monde pour défendre celles du Vanuatu... Mais en même temps, nous ne sommes que des observateurs, et nulle envie de juger, juste celui de constater.


Revenons au marché à l'heure du déjeuner. C'est le moment de trouver sur les étales le « lap lap » et de tuluk. Ce dernier est le sandwich local, qui ressemblerait à une crêpe roulée de pâte épaisse farcie de poisson ou autre. Le lap lap désigne la feuille dans laquelle les Nivans cuisent leurs racines (taro, manioc, fruit de l'arbre à pain, patate douce) et la viande ou le poisson. La feuille sert à tout : de plat de cuisson et d’assiette sur laquelle est disposée une tranche épaisse de manioc. Il a été au préalable râpé et mélangé au lait de coco. Sur ce socle sont disposés des viandes ou des poissons accompagnés de feuilles de bele (une sorte d'épinard du Pacifique). On emballe le tout dans les feuilles de lap lap, on passe au four de pierres brûlantes semi enterrées dans la terre. Ces plats sont servis, sans mouches additionnées, les cuisinières s'employant à ventiler à l'aide d'une branche ou d'une feuille les mets qui sont « offerts » à la consommation.


Cuisine scolaire au feu de bois

Partout au Vanuatu, la cuisine se fait au feu de bois. Sur le marché de Port Vila, des fagots sont vendus aux « citadins » qui ne possèdent pas de terres assez vastes pour disposer de bois de coupe afin d'alimenter leur cuisine. Celle-ci se fait à même le sol. A Pentecôte, nous avons visité une école professionnelle. Elle était particulièrement bien équipée, les classes de mécaniques, d’ébénisterie... bien conçues et financées par l'Australie. Quelle surprise en visitant la cantine de retrouver un four à pain comme il en existait dans nos campagnes en 1900 et les gamelles de taros cuisant à même le sol en béton dans la cuisine aux murs noircis par le feu de bois!


Pardonnez-moi, je suis passée sans transition de Port Vila à Pentecôte, laissez-moi vous emmener dans cette île du Nord de l'archipel.


L'île de Pentecôte luxuriante et montagneuse dessine un long trait horizontal sur l'océan. Une distance de 60 km sépare le Nord du Sud. En approchant de Pentecôte, se dévoile sur l'horizon, une longue suite de crêtes croulant sous la végétation dont le sommet est le mont Vulmat, il culmine à 947m. La côte Est n'est presque pas habitée, sauf à l'extrême sud et nord où des villages sont installés. A l'est le climat très humide a fait fuir la population qui a préféré s'installer sur la côte ouest, plus tempérée. Du Nord au Sud, les villages se succèdent le long d'une route de terre battue. Celle-ci traverse un nombre incalculable de rivières qui se jettent dans l'océan. L'île n'a pas les moyens de construire des ponts, elle compte de rares 4*4 qui traversent à gué les rivières, mais la plupart du temps, les distances se parcourent à pied. Peu de villages sont établis dans la montagne, ceux-ci, difficiles d'accès, voient très peu le monde extérieur et vivent en parfaite harmonie avec la nature. Sur les rivages, le confort moderne se limite aux téléphones portables (ils sont vraiment partout!). Les villages sont séparés par les rivières. Elles jouent le rôle fondamental de « cadastre » et découpent les vallées, les territoires de telle entité à ne pas confondre avec telle autre!


Maison de village typique du Vanuatu

Nous avons été surpris de ce découpage. Les villages formant plus des clans que des agglomérations rurales. Ici, il n'y a pas de gestion administrative au sens où nous l'entendons dans nos carcans occidentaux. Il n'y a pas de maire élu, mais un chef de clan, une autorité patriarcale qui se passe de génération en génération. Le chef est hautement respecté, pour son savoir ancestral, pour la continuité de la tradition et la conservation des coutumes. Les communautés vivent chacune pour elles-mêmes, n'encourageant que les échanges « commerciaux » pour les denrées qui leur manquent. En dehors de ce « commerce », on sent un réel cloisonnement entre chaque village. Il ne se limite pas à une géolocalisation coincée entre les rivières, la coupure est également coutumière.


Il règne comme une méconnaissance de son voisin. Chacun s'occupe de son coin, de son jardin, de son clan, et ne sait rien, ou dit ne rien savoir, de ce qu'il se passe de l'autre côté de la rivière.
Ici les mots les plus importuns sont certainement « attention », « envie de découverte », « soif de connaître l'autre ». Ceci est davantage dû au particularisme linguistique et au vécu historique qu'à un éventuel comportement d'indifférence. D'un point de vue historique, les clans ont perpétré des guerres séculaires (les premiers colons s'installèrent il y a 3500 ans). Ces guerres s'achevaient inévitablement par des épisodes cannibales. Toute personne non autorisée qui franchissait les limites de son territoire était susceptible d'être dévorée par le clan voisin. Il y a de quoi inscrire dans ses gènes une méfiance légitime!


C'est l'heure du diner...

En plus d'un passé extrêmement belliqueux, l'île se partage entre 5 zones linguistiques. Voilà qui n'est pas pratique pour moi qui aime apprendre dès mon arrivée dans un nouvel endroit quelques mots comme merci, bonjour, au revoir. Je ne me suis rendu compte de cette diversité qu'après avoir utilisé fièrement mon « ren mamak » (bonjour) voyant une jeune personne traverser la rivière en même temps que moi. J'ai vu un énorme sourire moqueur me répondre. Non découragée, je balance plus loin, un « Kobiah bu bu" (merci beaucoup) bien à propos. Et là c'est l’hilarité la plus volubile que j'ai créée dans ma carrière de voyageuse! Décidément au pays des polyglottes mieux vaut adopter la pratique des 3 sages : je ne parle pas, je n’entends rien, et je ne vois rien!


Le Vanuatu compte plus de 115 langues vernaculaires qu les pays colonisateurs ont enrichi de l'anglais et du français à partir de 1905. Mais aucune des deux n'est parvenue à détrôner les dialectes locaux. La langue la plus parlée à Pentecôte est le raga, mais il existe 4 autres langues : sa, seke, sowa, apma. Ces langues si différentes les unes des autres empêchaient, les communautés de vraiment communiquer. Avec la colonisation, est née une langue commune à toutes les îles des Vanuatu. Cette langue est le bislama, un dérivé du pidgin adapté à l'archipel. L'apprentissage d'une langue commune a ouvert l'espace clanique, mais ce n'est encore, dans bien des vallées, qu'un entrebâillement. Et si chaque clan est polyglotte , il reste centré sur lui-même. Cette polarisation est favorisée par les hommes d'Église. Vu qu'un village sur deux est catholique francophone ou protestant anglophone, les prêtres et missionnaires n'encouragent pas leurs ouailles à s'épanouir de l'autre côté de la rivière!


115 langues sont encore pratiquées

Ne pensez pas pour autant que tous les insulaires sont de parfaits polyglottes. La plupart le sont, mais beaucoup de personnes se limitent à leur langue clanique, passant toute leur existence dans un périmètre particulièrement restreint.


En nous baladant sur l'île de Pentecôte, nous devons faire l'effort de nous rappeler que nous sommes au 21e siècle. Parfois une sonnerie de téléphone portable nous y aide. Cependant, nous nous demandons comment, ils se rechargent. Il n'y a pas ici d'électricité publique pour relier les maisons entre elles. La télévision n'a pas encore fait de ravage. D'après certains témoignages évasifs, seules une famille, voire peut-être deux la possèderaient sur l'île. Cependant on ne voit pas bien comment elle serait alimentée. Pour la recharge des téléphones, quelques foyers disposent de mini-panneaux solaires. Par contre, l'eau courante existe partout. Non par des canalisations publiques, mais bien par le moyen le plus naturel qui soit : la rivière et les pluies qui sont sur les Vanuatu prolixes. J'ai surnommé l'archipel, le pays du long nuage gris foncé!


Si le ciel est gris en quasi permanence, il favorise des prodiges de la nature. Au sein d'une végétation extraordinaire, des cascades généreuses d'eau fraîches offrent un bain revigorant et un panorama sublime. Il y a bien longtemps que nous n'avions vu de si belles cascades... Et moi j'en suis fan !


Elevage en pleine nature

La nature, outre qu'elle régale les yeux des curieux que nous sommes, nourrit tout le monde, car personne ne meurt de faim, ou alors, il serait particulièrement paresseux. Tous possèdent « un jardin » où les ignames, le taro, la patate douce, les fruits les plus sucrés y poussent sans aucune difficulté. Parfois le poisson vient agrémenter les plats, mais la pêche n'est pas très développée. Seuls quelques-uns possèdent une pirogue, petite, taillée dans un tronc. Elles ne supportent pas le gros temps et dès qu'il y a du vent, elles restent à terre, retournées sous un arbre. La météo du coin n'est pas coopérative, et donc, les cochons, les vaches, les poules... fournissent la viande. Ce peuple a oublié sa génétique de grand navigateur!


Tous les insulaires vivent au plus près de la nature. Ils croient encore aux esprits. Ils aiment gagner leurs faveurs pour que la récolte soit bonne, que leur femme soit féconde... Les rites animistes des Vanuatu s'étirent sur une longue, très longue liste. Il existerait autant de communautés que de langues et chaque communauté entretient soigneusement ses propres coutumes nanties de nombreux rites. L'un des plus spectaculaires d'entre eux a lieu sur l'île de Pentecôte, c'est le Naghol.


Saut traditionnel du Naghol

La genèse de cette coutume, se trouve dans une légende qui met en scène, une femme et un homme. Désirant échapper au devoir conjugal, une jeune mariée fuit dans la jungle. Se sentant poursuivie par Tamalie, son époux, elle monte au plus haut d'un banian, puis se jette dans le vide. Tamalie désireux de la rattraper se jette à son tour, mais il se tue dans la chute. Il n'avait pas vu que la rusée épouse non consentante était retenue par les pieds à une liane l'empêchant de s'écraser à terre.


De nos jours, en avril, mai, au moment où les lianes de la jungle ont atteint leur maximum de maturité, les hommes de Pentecôte se jettent du haut d'une tour étayée de lianes et construite autour d'un arbre. Le sommet de la tour peut dépasser 20 mètres et atteindre jusqu'à 35 mètres. Les hommes des différents clans du sud de l'île de Pentecôte perpétuent la mémoire de Tamalie trompé par sa femme. Ils le vengent en quelque sorte, car ils sont les seuls à pouvoir accéder aux tours et à s'adonner à ce « sport » particulièrement dangereux. Les femmes sont reléguées à l'arrière-plan. Elles dansent, pagne sur les hanches, torse nu en sifflant et en haranguant les jeunes hommes qui se soumettent à la tradition du Naghol.


Plonger de 26m attaché à une liane!

Outre la vengeance de leur « frère », les hommes de Naghol sautent dans l'espoir de rendre la terre fertile et que la récolte d'ignames soit bonne. Le but est de toucher la terre de leur épaule et de leur tête. Car si cette coutume ressemble étrangement au saut à l'élastique, le résultat en est tout autre. Dans le cas du sport moderne, tout est prévu pour vibrer, frissonner, mais surtout ne pas toucher terre! Dans le cas du Naghol, les lianes reliées à une extrémité à la tour, et à l'autre aux chevilles des sauteurs sont prévues pour que celui-ci touche terre. La stratégie la meilleure afin de « limiter » la casse, serait de s'élancer le plus loin possible de la tour. Les lianes se détendent complètement, amortissent le choc, puis par effet de rebond, le sauteur atterrit sur une terre retournée et ameublie.


Je vous assure que lorsque vous êtes sous la tour, vous crissez des dents en entendant le « boung » sur la « terre amollie ». Dom est monté en haut de la tour, « pour voir ». Il a non seulement remarqué que la structure était extrêmement fragile, mais à cette hauteur, il faut plus que du cran pour s'élancer! La consommation de kava ne permet pas la totale amnésie de la peur. Ceci explique sans doute, les « joints » qui se passaient de bouche en bouche juste avant les sauts (!)


Saut à la conclusion parfois tragique

L'office du tourisme détesterait ce qui va suivre, mais il faut que je vous dise tout. Ces sauts sont extrêmement dangereux. Sur le temps de notre séjour à Pentecôte, les lianes de deux hommes se sont rompues. Le premier est paralysé, le second s'est relevé groggy, mais on l'a vu quelques heures après le saut, il souriait, et n'avait pas « d'effets secondaires ». Pire, Air Vanuatu n'a pas voulu « évacuer », le jeune paralysé vers Port-Vila et son hôpital. On l'a vu entouré des siens, portés sur une civière de bambous. A Port-Vila, le ministère du tourisme lui-même a empêché son rapatriement pour des raisons sombres et absurdes. Lorsque nous étions avec lui à l'aéroport, une infirmière de passage a tenté de faire bouger les choses. Elle n'y est pas parvenue. Nous ne savons pas ce que ce jeune est devenu. C'est la première fois en huit ans que nous assistons impuissants à une situation aussi absurdement injuste.


Je sens la question vous brûler les lèvres : « est-ce une attraction purement touristique? »
Non, ces sauts auront lieu, qu'il y ait des touristes ou non. Les enfants circoncis sont envoyés dans les étages inférieurs afin de prouver leur bravoure. Celui qui ne saute pas n'aura pas accès aux mêmes droits que ceux qui ont sauté. Il ne pourra par exemple pas se marier, et la femme aux Vanuatu est considérée comme une possession, une marque de richesse, tout comme le cochon d'ailleurs. Un homme prospère a une femme (voire plusieurs) et des cochons.


Traditions de l'île Pentecôte

Si ces pratiques paraissent sauvages, et primitives, pour autant, les hommes du naghol ont compris qu'en plus d'attiser la fertilité de la terre et de prouver leur bravoure, leur coutume parmi les plus spectaculaires du Pacifique pourrait leur rapporter gros. Dans un pays pauvre, où le gouvernement n'aide guère à l'éducation et à la santé, il est important de trouver des moyens de drainer l'argent nécessaire à faire fonctionner leur communauté. Ainsi, les villages du sud se sont entendus pour dresser trois sites « touristiques ». Après les sauts du mois d'avril et de mai qu'ils exécutent en vase clos, sur leur territoire, les villages se succèdent sur les trois sites touristiques jusqu'en juin. Chaque Naghol rapporte au village des sommes pouvant aller jusqu'à 10 000 dollars, la moyenne se situant autour 6000 dollars. Cette somme n'est pas faite pour rétribuer un homme en particulier, car l'esprit communautaire de chaque village dépasse l'individualisme. Ainsi, certaines années tel village sautera pour donner l'argent à l'église, tel autre, pour construire une école, une clinique, ou encore offrir, aux élèves méritants, une bourse d'études hors de l'île (Port Vila, Nouvelle-Zélande, Australie, ou Calédonie).


Vous avez bien lu... l'argent va également à l'église, pour reconstruire son toit, ou agrandir ses murs. Malgré les coutumes animistes, les croyances aux esprits, la consommation de kava, de marijuana et des pratiques encore récentes de cannibalisme, les insulaires sont pour la plupart de fervents catholiques ou protestants. Ils sont parvenus à insérer dans leur quotidien, une religion, alors qu'ils ne se sont pas laissés faire par les prêtres et missionnaires qui ont tout tenté pour qu'ils abandonnent leurs rites et coutumes aux antipodes des préceptes de la bible...


Les hommes de la chrétienté sont pour la plupart des locaux, ils sont les gardiens de l'éducation et favorisent la scolarisation.


Enfants souriants du village

A Pentecôte, nous sommes projetés dans le temps. Dom revit son passé, son enfance dans l'Auvergne de 1950. Il me dit des choses comme : « ha comme c'est bon de sentir la bouse de vache »... (!!!!) Je fais un voyage dans le temps également. Mais pas vers le passé, vers l'avenir. Je me dis que si Pentecôte et les îles des Vanuatu préservent leur manière de traiter la nature, elles deviendront dans 100 ans, ou plus... des « paradis convoités ». Non sur le plan humain, qui est rude et mérite quelques adoucissements, mais sur le plan de l'environnement. Nous avons vécu une petite semaine dans une famille, nous nous sommes nourris comme eux, nous avons bu l'eau des rivières. Connaissez-vous encore beaucoup de pays, où l'eau consommée n'est pas traitée pour la rendre potable ? Ici, elle l'est naturellement ! Ils n'ont besoin de rien, il est fort peu probable que les énergies fossiles arrivent jusqu'à eux pour apporter dans leurs huttes l'électricité. Ils n'ont besoin d'aucun pesticide, d'aucun engrais, pour faire pousser leur base alimentaire. Les vaches paissent sur une herbe grasse, les cochons se baladent librement, ainsi que les poules. Voici l'exemple de tout un peuple qui vit en harmonie avec une terre qu'il utilise depuis plus de 3500 ans, sans la spolier.


Vanuatu signifie en langue locale « la Terre qui se relèvera toujours ». Cet archipel a tout connu : la colonisation, les déportations « d'esclaves » vers l'Australie ou la Nouvelle Calédonie, les séismes, les tsunamis, les éruptions volcaniques et les cyclones, et chaque fois, il se relève. Ce pays « tient debout », parce que sa population a compris que la Terre était le plus précieux des biens, celui qu'il convient chaque jour de respecter.




A plus, pour découvrir d'autres horizons



Nat et Dom


www.etoiledelune.net



PROJETS A VENIR


Nous mettons le bateau en vente.


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Loin de signifier la fin de notre périple, cette décision est inspirée par l'envie de voyager autrement. Au bout de huit ans de voyage, de 10 ans de vie commune avec le bateau, il est temps pour nous, et pour lui de trouver de nouvelles énergies. A l'approche du continent asiatique, nous désirons pénétrer à l'intérieur des terres, partir vivre avec les peuples et trouver une base de voyage aux alentours de la Thaïlande qui offre un énorme rayon de découverte. Quant au bateau, il sera heureux de repartir avec un nouvel équipage, qui trouvera en lui, un compagnon fiable, robuste et fidèle. Il veut encore et encore chevaucher les océans. Nos destins se séparent, pour un renouveau. Toujours, nous chérirons dans notre coeur ce sillage que nous avons tracé ensemble en parfaite harmonie.


Mais en attendant de trouver ceux qui largueront les amarres avec la belle coque jaune, nous poursuivons notre chemin ensemble, entre Vanuatu et plus tard, la Nouvelle-Calédonie.


Pour les habitués du site internet de L'Etoile de Lune, celui-ci restera ouvert, et vous aurez accès à toutes les données offertes aux navigateurs sur Internet durant toutes ces années. Nous poursuivrons notre partage via nos lettres périodiques, toujours sous le label « Etoile de Lune », car plus que le nom d'un bateau, c'est l'incarnation de notre chienne qui nous suit et nous protège.




Photos du mois

Vanuatu signifie « le pays qui se tient debout » ou « qui se relèvera toujours ». Les hommes de Pentecôte qui exécutent le saut de Gaul, sont l'un des symboles les plus forts de l'archipel. Ils se relèvent... presque toujours de l'un des rites les plus dangereux qui soit.



Le repas des guerriers

 
© Droits réservés 2019 : etoile-de-lune.net | Article rédigé par Nathalie - Mise en page de Dominique