Lettre d'escale 100– écrit en avril 2012
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Récit : Huahine, Maupiti et départ de Polynésie
![]() Fin de journée sur Maupiti |
"Plus on connaît ces gens, plus on les aime"
James Cook à propos des Polynésiens en 1773
PROGRAMME DE NAVIGATION
Départ prévu de Polynésie vers le 1 mai. Direction Wallis (environ 1500 milles nautiques) puis direction les Vanuatu (920 milles nautiques).
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Au large, nous pouvons, grâce aux satellites, vous donner des nouvelles quotidiennes du bord et de notre progression.
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Plusieurs nouveaux albums photo :
Huahine :diaporama
Sélection parmi 1000 clichés de fleurs :diaporama
Sous-marines 1 et 2 :
EN FIN DE MESSAGE :
La photo du mois : Une vie de chien sous les Tropiques...
![]() En route pour de nouveaux horizons |
Résumé
Après le chantier, nous partons pour une nuit de navigation vers Huahine. En route, nous retrouvons notre Etoile, fringante, elle caracole sur l'océan Pacifique. Malgré un vent très léger, les voiles nous suffisent pour atteindre cette île qui s'est toujours refusée à nous.
Va-t-elle enfin s'ouvrir ?
Repus de nouvelles images, une petite pause dans l'un de mes coins préférés de Polynésie, et nous repartons vers une nouvelle découverte : Maupiti !
Ah Maupiti ! Sans cette île, notre image de la Polynésie aurait été bien incomplète !
Puis ce sont les grands « au revoir », le cœur serré, l'âme en peine, les yeux pleins de larmes se tournent vers l'ouest.
Nous filons vers de nouvelles aventures et l'horizon bleu nettoiera notre chagrin, pour attiser de nouvelles curiosités.
Bonjour,
![]() Un bureau idéal... |
Chers amis, nous avons choisi de vous écrire cette centième lettre d'escale depuis l'Arcadie de la Polynésie. Pour l'occasion de ce centenaire qui, si vous accumuliez toutes les lettres d'escale, constituerait le point d'orgue d'un livre de 600 pages, nous avons quitté notre cockpit. Hé, non, je ne vous écris pas depuis « mon bureau flottant » qui a vu tant de mots s'aligner pour vous décrire notre belle Planète. Je suis sur la petite plage du Motu Tiapa'a qui marque avec son jumeau Pitiahe, la passe du lagon de Maupiti. Je suis installée à l'ombre de ce que l'on nomme ici un « faux tabac », arbre en forme de parasol, aux feuilles qui ressemblent étrangement au tabac. Un alizé léger empêche les moustiques de flirter avec mes mollets. Je suis donc assise, sur la terre ferme, à une table, fichée dans le sable blanc, tandis que Dom repose à l'ombre dans un « hamac moderne ». Face à nous, le lagon, ses couleurs étincelantes, la barrière de corail où se fracassent des petites vagues, qui pourtant font éclater l'écume dans un ronronnement perpétuel. Au-delà de l'horizon bleu outremer, le mamelon de Bora.
J'avoue avoir du mal à me concentrer. Entre le petit « Aito », chiot de 3 mois qui joue avec mes orteils, et la vue sur l'horizon dont je ne me lasserai jamais, mon esprit vagabonde, mes doigts se relèvent du clavier au rythme où mon regard musarde.
![]() HUAHINE l'authentique... |
Est-il possible qu'il en soit des affinités d'îles comme il en est entre les hommes ?
Je pense que oui.
![]() Le lagon intérieur de Huahine |
Mais nous avons quitté Tahiti. Par une belle météo, un ciel limpide et un Pacifique serein. Notre Etoile brille des mille feux de sa nouvelle robe. En une nuit, nous rallions celle qui s'est toujours refusée à nous, Huahine. De coup de mara'amu, en rendez-vous imposés ailleurs, de crises d'incendies en retrouvailles ratées, jamais nous n'avons pu visiter correctement Huahine. A la sortie du chantier, nous étions bien décidés de louer une voiture et d'en faire le tour, de découvrir cette âme qui a charmé tant de nos amis. Alors qu'au large le soleil brillait, notre séjour se passe sous un ciel mitigé, et la jeune personne que nous avions contactée pour réserver la voiture nous a oubliés.
A cœur vaillant rien d'impossible !
Nous visiterons Huahine !
![]() Marae et pièges à poissons |
Est-ce la couleur du ciel, ou Huahine est vraiment très différente de ses sœurs ? On entend ci et là les touristes dire : « on en fait vite le tour ». Pourtant, elle est plus grande que Bora et Maupiti. Huahine s'endort-elle ou ne s'est-elle jamais réveillée ? Sans doute a-t-elle défini sa propre notion du temps. La crise frappe, les pensions ferment, certains restaurants n'offrent le repas qu'à condition d'avoir réservé la veille en spécifiant les plats qui seront dégustés, les loueurs de voitures oublient leurs clients sur le quai, le marché de fruits et légumes n'est plus actif chaque matin... Huahine s'endort, elle se laisse bercer par la crise. Elle frappe, elle est là, sournoise, mais les habitants, flegmatiques, fatalistes sourient et disent « iaorana » comme si rien jamais n'arriverait à entacher cette générosité qu'ils cultivent au quotidien.
![]() Enfants de Huahine |
Au-delà de ce cœur vert, Huahine Iti a le pouvoir d'arrêter les aiguilles de l’horloge et de réveiller le soleil. Les nuages s'effacent et découvrent le lagon de Parea. Ses couleurs tentent de faire oublier ses collines. Elles ont souffert de l'incendie de septembre dernier qui a failli nous transformer en « poulets boucanés » sur le pont de notre Etoile. A la tombée de la nuit, les oiseaux ont repris le contrôle des falaises, occupant de leurs nids chaque cavité. Ils chantent, ils gazouillent, c'est sûr, bientôt les arbres roussis auront eux-mêmes pardonné aux inconscients !
![]() Au jardin de corail |
Bora, escale que nous aimons, est à présent devant l'étrave. Nous y retrouvons Carole, Patrice qui ont gardé notre courrier. Nous arrangeons les derniers détails administratifs... Ça sent le départ !
Oui, mais pas sans faire escale à Maupiti !
![]() Maupiti le débarcadère |
Nous trouvons ici, la même culture de vie qu'en bateau. La population reste marquée par le cyclone de 1997 Osea qui a détruit l'île à 100%. Nous discutons avec plusieurs familles qui se confient sur leurs craintes. Elles nous disent : « Lorsque l'eau monte, que la houle traverse la barrière de corail, elle emporte tout, nos maisons, nos biens... La mer peut tout nous prendre. Le vent arrache les arbres et détruit ce qui nous nourrit... » Mais aujourd'hui plus rien de ce cyclone n'est visible, même les Uru (arbres à pain) qui jalonnaient la seule route du village et qui tombèrent les après les autres pendant le cyclone, ont été replantés. La vie revient, elle n'oublie pas, elle continue.
![]() Ciel en feu le soir sur Maupiti |
Et la conversation s'engage. Nous croisons des pêcheurs. Ils attendent de faire le plein de gasoil pour leur bonitier. J'ai droit à un cours détaillé de ce qu'est la pêche à la bonite. Ils sont cinq sur le bateau. Le barreur, deux pêcheurs et deux « ramasseurs ». Un peu comme sur un cours de tennis. Lorsqu'ils tombent sur un banc de bonites, ils parviennent à extraire de la mer 300 poissons en une demi-heure. L'exploit est que cela se fait, non pas au filet, mais à la canne de bambou. Ils vont chercher les bambous sur Raiatea.
Les deux pêcheurs, debout à l'arrière du bateau, sans appui, lancent les appâts faits de plumes, de nacre et d'un hameçon en inox. La canne de bambou mesure sept à huit mètres, elle pèse lourd, la mer est toujours agitée, et ils envoient sans faiblir, sans déséquilibre la ligne, ils ramènent aussitôt le poisson que le « ramasseur » décroche rapidement, et ils renvoient la ligne... Au bout du compte, ils partent sur Bora, où ils vendent leurs prises. Ces pêcheurs sont d'une stature puissante, digne de braver l'océan le plus remuant de la planète.
![]() La forte houle peut refermer la passe |
Pourtant notre pêcheur ne cherche pas le temps calme. Il nous dit que les poissons ne mordent pas aux leurres lorsque la mer n'est pas assez agitée...
![]() Les motus d'entrée de Maupiti |
Dans le lagon de Maupiti, on trouve une île haute, son village principal de Vai'ea, ainsi que quatre motus de tailles diverses. Partout, les maisons sont colorées et entourées de haies fleuries. La fleur de tiaré embaume toute l'île. La tradition veut que le premier plan de tiaré qui a donné naissance à tous ses descendants sur toutes les îles de Polynésie soit né, ici, à Maupiti, sur le motu Pitiahe qui marque la passe en son ouest. Là se trouvait le pied mère, jusqu'à une époque récente, où le propriétaire du terrain brûla l'arbuste dont le tronc avait une circonférence d'un bon mètre. La fleur de tiaré est répandue sous le nom de Tiaré Tahiti, mais à Maupiti, nous apprenons son nom d'origine encore usité sur l'île : Tiare Maurua. C'était le nom que Maupiti portait encore en 1722, lorsque le premier navigateur européen croisa dans les parages : Jacob Roggeveen.
![]() La fleur de Tiare originaire de Maupiti |
L'île produit quantité de ces tiarés qui alimentent nombreux marchés, dont celui de Papeete. Elle produit également le coprah, le melon et d'excellentes pastèques. Ces merveilles repartent de Maupiti vers les autres îles grâce à la navette qu’exécute le Maupiti Express. Ce bateau transporte, ainsi que des passagers, la plupart du fret qui arrive sur l'île. Pourtant, nous apprenons sur place que son propriétaire, surendetté, a mis le bateau en vente. C'est une réelle catastrophe pour les insulaires. Aucun cargo régulier, comme le Taporo qui assure la liaison entre Tahiti et les îles sous le vent ne peut entrer à Maupiti. La passe n'est pas assez profonde, le lagon non plus. Les autres moyens de transport sont alors l'avion (cher et peu rentable, la compagnie Tahiti Nui, en déficit, réduit à peau de chagrin ses rotations) et une petite goélette (minicargo) qui vient toutes les trois semaines, voire tous les mois et qui annule souvent son voyage pour non-rentabilité de Fret.
Malgré cette perspective peu réjouissante, l'île assume son statut de « bout du monde » et l'ambiance est, partout, reposante, décontractée et bienveillante.
« Demain est un autre jour ».
![]() Pétroglyphes de tortue |
Nous faisons halte à chaque « attrait » de l'île : de nombreux marae, tous en ruine, les champs de tiaré, et les pétroglyphes, héritage des tupunas laissés dans le lit d'une rivière sertie d'une forêt appréciée des moustiques. Et puis, la pirogue du dieu Hiro, nous attend au creux d'une forêt pentue. Une roche de dix mètres de long sur 2,5 mètres de large est nommée Te pahi O Hiro, un trésor naturel qui inspira la légende de la pirogue du Dieu Hiro, abandonnée par celui-ci alors qu'il tentait de la dérober. Un classique du panthéon polynésien !
En plus du tour de l'île, nous nous offrons l'ascension de son sommet qui culmine à 372 mètres. Ne jugez pas trop vite de notre « exploit » ! Chaque mètre est gagné à coup de mollets (un peu rouillés!) qui se hissent sur une pente raide, parfois, les pieds, les mains ne suffisent pas, et nous nous retrouvons accrochés à une corde de sécurité. Bonjour le vertige ! J'y suis sujette et pendant toute la montée, je me demande comment je vais descendre ? Mon point faible !
![]() Du sommet de Maupiti (370m) |
Sur l'horizon s'étalent à l'est : l'atoll de Tupai, Bora Bora, Taha'a et Raiatea. Le temps entre gris clair et bleu foncé nous laisse de larges éclaircies et une excellente visibilité. De notre observatoire, nous contemplons l'entrée sans faute d'un catamaran. Depuis notre arrivée, la passe est particulièrement sage !
Elle le sera aussi le jour de notre départ...
![]() Nos dernières images de Polynésie |
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Nat et Dom
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