Eudaimôn ... « Heureux ! »

Je ne vous ferai pas ici l’apologie des navigations idylliques sous les étoiles. Rangez ces visions au placard de vos illusions, ça n’existe pas ! Le vent est toujours trop fort ou trop faible. La mer ça bouge et par définition ce n’est pas confortable.

Et pourtant… quel pied !
Ca vaut franchement le coup de se faire secouer…

Dissection d’un bonheur annoncé…

Dans cette page, vous trouverez des articles qui vous raconteront les bonheurs inclassables d’une croisière autour du Monde.

« Liberté, liberté chérie… »
Vers l'été éternel
Se lassera-t-on un jour de voir des dauphins à l’étrave ?
L'Océan le dernier bastion de la liberté
Le plus beau métier du monde
Le buletin météo sous les tropiques
Etoiles filantes en traversée

 

 

 

« Liberté, liberté chérie… »

Des siècles de philosophie ne sont pas venus à bout des définitions du concept si simple, si universel qu’est la liberté. Il suffit pourtant de larguer les amarres et de respirer à fond.

Vous souvenez-vous de vos premiers cours de natation ? Cette première fois…
Ce jour où, vous avez lâché les bords de la piscine. Faites revivre cette sensation. Elle est si intense, si chargée d’émotions, de craintes et de satisfaction à la fois, que vous en oubliez une fonction vitale : respirer… Et vous vous retrouvez en apnée, à barboter, et à gesticuler…

Puis, il vous revient l’idée de respirer…

Vous vous sentez mieux, n’est-ce pas ?

Vous apprivoisez cet élément qui n’est pas le vôtre. Vous nagez ! Ca y est ! Tel l’oiseau qui vole pour la première fois, vous êtes en suspension au-dessus des grands abîmes liquides…

Et voilà, c’est aussi simple que cela. Chaque fois que nous larguons les amarres, à la sortie du port, cette impression ressurgit immanquablement.
Une manière plus prosaïque de traiter ce concept est de dire tout simplement :
« On en a marre, on se casse ! »
On ne peut plus concret, il est vrai…
L’inverse arrive aussi :
« On adore, on reste ! »
Et puis il y a toutes les variantes possibles entre ces deux extrêmes. Bref, nous ne sommes limités ni dans le temps, ni dans l’espace (du moins tant que Dieu nous prête vie) Nous allons où nous le désirons, quand nous le désirons. Les seules contraintes, et elles ont toutes autorités sur nous, sont les conditions météos.

En réalité, le bateau est le plus formidable véhicule de liberté qui soit.

Vers l’été éternel

Trente sept années avaient incrusté ma vie de mauvaises habitudes saisonnières. Dès septembre, je craignais les premiers frimas. Fin octobre je grelottais déjà. En novembre, j’arborais l’humeur glauque d’un ours prêt à s’enfoncer dans sa caverne pour tout l’hiver. L’hiver, j’hibernais effectivement. Le printemps était toujours trop frais à mon goût, et l’été trop court…

La vie devient un enchantement à partir de la 25ème latitude Nord (en descendant toujours plus sud… mais ( !) en s’arrêtant à la même latitude pour l’autre hémisphère…). Seules les journées plus courtes rappellent un changement de saison… Dès lors, au diable les pull-overs, les polaires et les sweets !

Bon OK, j’exagère, les quarts de nuit sont humides. De plus, le corps s’adapte au chaud, et on finit par mettre une petite laine sous 25° et en-dessous de 23° « we are freezing » comme disent nos amis anglo-saxons.

Se lassera-t-on un jour de voir des dauphins à l’étrave ?

Nous naviguons depuis… un CERTAIN temps. Les rencontres avec la faune maritime sont nombreuses à avoir gravé nos mémoires. Chaque fois, c’est une fête à bord. C’est mieux qu’un feu d’artifice, plus beau que les illuminations de fin d’année, plus émouvant qu’un mariage… plus, plus…

Au cours d’une navigation il est excessivement rare de ne pas rencontrer au moins un représentant de la faune aquatique. Surprendre leur présence demande de longues heures d’observation. Ca tombe bien, nous passons des heures dans le cockpit à regarder la mer ! Chacune des rencontres est répertoriée dans le livre de bord… La liste commence à être conséquente…

Les premières rencontres marquantes furent, non pas des dauphins, mais des daurades. C’était notre première navigation de nuit, entre Port Camargue et Minorque. La météo avait été annoncée bonne mais comme il se doit en Méditerranée nous avons essuyé force 7 à 8 pendant la nuit. Au petit matin, j’étais de quart et en même temps que le lever du soleil je découvrais le chaudron de sorcière dans lequel nous marinions… Sous notre jupe arrière à tribord, 5 daurades surfaient dans les vagues. Un escadron accompagnait ma veille. Elle glissaient sous le vent des vagues, on aurait dit qu’elle se régalaient autant qu’un touriste qui découvre un sport de glisse. Lorsque le Cap se leva pour me relayer, il voulut lancer la ligne de pêche. C’est là qu’il s’arrêta net en entendant mes arguments : « n’y touche pas ce sont mes copines ! »

En Méditerranée, nous avons également rencontré des cachalots faisant de gros câlins à 5milles à peine de la sortie du Golfe de Saint Raphaël. Nous avons pu rester 25 minutes en leur compagnie. Des baleines passaient à la sortie du Golfe de Campo Moro en Corse, nous le quittions, elles croisaient notre route. Dans ce même golfe, chaque soir, des dauphins venaient profiter de l’environnement d’une ferme marine. Nous avons réveillé un banc de tortues entre Minorque et Sardaigne. Sur ce même trajet, par mer calme, des dauphins nous ont offert les plus belles photos que nous puissions faire d’eux. Un oiseau migrateur est venu faire un bout de chemin avec nous, entre Corse et Continent, se régalant de tous les insectes qu’il trouvait sur le pont et dans les voiles.

Dans la descente entre Porto Santo et Graciosa, 8 dauphins sont restés avec nous pendant plus d’une heure. En Mauritanie, le banc d’Arguin est le fief de familles de dauphins à bosse de l’Atlantique, ils sont sédentaires. Nous les avons vus s’organiser en bandes et chasser les bancs de mulets. Viennent s’y mêler des représentants des grands dauphins qui sillonnent quasiment toutes les mers du monde… sauf les plus froides.

Dans les parages de Saint Barth une baleine à bosse et son baleineau sont venus tout près de nous sur tribord. Ils ondulaient à fleur d’eau. Les baleines à bosse fréquentent ces eaux en période d’accouplement et reproduction.

D’énormes tortues ont croisé en même temps que nous, dans les eaux de Saint Domingue.

A Culébra un Dauphin est venu jouer autour du bateau, le jour de mon anniversaire. Toute la soirée, nous avons entendu son souffle, c’était magique. Au large de Saint-Vincent, un banc de 300 dauphins sautaient dans tous les sens, nous étions à quelques encablures. Avant de pénétrer dans la passe du Marin un dauphin, est venu, en signe d’amitié à l’étrave. En quittant la Guadeloupe pour Antigua, un petit dauphin tout noir est venu faire le fanfaron. Il nous a fait un vrai numéro de cirque, cabrioles et jeux d’étraves au programme. Entre, Prickly et Anguilla, une troupe de dauphins nous a accompagné, comme pour nous montrer le chemin. Entre Antigua et Barbuda, alors que le Cap avait des démêlés avec l’enrouleur de génois, une baleine a sondé, juste devant l’étrave, abandonnant une auréole étincelante d’émeraude en surface.

A suivre tout autour de notre si jolie planète…

L’OCEAN, L’UN DES DERNIERS BASTIONS DE LA LIBERTE, EST UN JARDIN D’ECUME, OU L’ON APPREND CHAQUE MATIN A CUEILLIR UNE PART DE SOI

Elle était rêvée depuis plus de 10 ans. En 1991 le Cap m’emmenait en Martinique. Lors d’une excursion en catamaran, j’eus la révélation : « Un jour je reviendrai par mes propres moyens ! »

Présomptueuse, je ne savais « naviguer » que sur une planche à voile. Qu’importe, le Cap eut la bonté de me prendre au sérieux et de m’apprendre à naviguer sur un « vrai » voilier.

Et voici que nous sommes à la veille de cette Traversée. Au lieu de ressentir la satisfaction de la réalisation du rêve, je gamberge et je me laisse empoisonner l’esprit par les commérages de ponton. J’ai peur de tout…
De tout quoi ?
De n’importe quoi !

Le Cap, confiant dans notre bateau, nos capacités et notre préparation ne se laisse pas influencer et s’élance avec sa petite troupe sur l’Océan !

Il a raison !

Surmonter ses craintes stériles, passer au-delà des angoisses non fondées, être hermétique à la confusion qui règne sur les pontons et larguer les amarres pour ne plus laisser la place qu’au seul bienvenu à bord : Le bonheur !

Sur l’Océan…
Le jour, la vie s’organise à bord entre les repas que nous partageons et ces interminables moments contemplatifs interrompus par les vacations météo et de longues conversations dans le cockpit. Nous faisons rimer humour et philosophie, réflexions existentielles et responsabilité de l’homme pour préserver cette planète si belle. Bref, nous refaisons le monde.

A ses heures, le Cap lit ou résout de nombreuses équations mathématiques. Tant, que je me demande s’il ne va pas découvrir le premier théorème transatlantique. Moi, j’écris, évidemment. Des pages entières du carnet de voyage qui fera date. Chaque rencontre est consignée : troupes de dauphins, oiseaux pélagiques, espadon voilier, 1 requin, baleines, poissons multicolores suiveurs. Et puis, le bonheur sur l’eau est si colossal, qu’aucun cahier ne suffirait à exprimer la multitude d’émotions ressenties.

Le Cap me répète souvent : « Tu réalises que tu es dans TON rêve ? »
J’ai vécu dans l’attente de cette rencontre avec l’Océan. Et au milieu de l’eau, je vis mon rêve. Il est réalisé à la perfection. Chaque jour, j’ai l’impression que l’Océan m’enseigne, à moi, infime goutte dans l’incommensurable, des bribes de sa sagesse.

Il y a des moments mythiques, comme celui qui voit notre route couper le 19° 99 999N puis le 20° 00 000 de latitude Nord. Nous gagnons la ceinture tropicale ! Nous sommes au pays des poissons volants. Désormais, le ventilateur sera soumis au régime des alizés.

Les journées s’écoulent simplement, dans une liberté absolue, échappée de tout ascendant. Pendant les quarts de nuit, les pensées s’évadent et l’Océan donne à mes pauvres neurones de terrienne une latitude marine, un déclic cosmique. 360° d’horizon sous les étoiles, pour un regard qui porte à l’infini sur les beautés de notre Planète. Admirer l’immensité, qui enfle sous l’effet de l’obscurité donne envie de chérir notre planète, de témoigner en sa faveur et de la faire aimer … belle pour que chacun apprenne à la respecter.

L’Océan est si vaste, il emplit la tête et le cœur. Il impose son rythme.

Au milieu de l’eau, le désir de débrancher les influences est féroce. Véritables pollutions de l’âme, elles se taisent enfin ! L’âme y fabrique des sentiments qu’elle ne connaissait pas. Ils sont uniques et endémiques à l’Océan. C’est un mélange d’immensité, d’humilité et de respect face à la puissance des éléments.

Bien sûr, la part de risque reste présente à l’esprit. Mais, l’on s’imbibe de tout autre chose. Il y a la conscience du Monde, de sa beauté, et de sa force. Nous sommes, là, minuscules choses à la merci de cet Océan que rien n’influence. Nous sommes soumis à sa bonne volonté. Si nous passons, de l’autre côté, c’est parce qu’il l’aura voulu.

Pour partir sur l’Océan, il faut plus que l’aimer. Nous dépendons de lui. Dès lors, il faut l’aimer à l’infini. Le regarder, le contempler, le craindre, et l’écouter. Il faut vivre et ressentir chaque mouvement comme un conseil, un avertissement.

Il parle sans cesse et statue sur notre sort. L’Océan n’est pas là pour apaiser les cœurs en quête de sérénité. Il est là, partout autour de nous. Il pénètre chacune de nos pensées et soumet notre ego pour libérer l’amour essentiel.

L’Amour de tout, de cette Planète, des êtres et de la vie. L’Amour épuré de tout formalisme, lavé de ses préjugés, gagne en qualité. Chaque jour, en mer permet de tirer la substance essentielle de la vie et d’approcher sa quintessence. Le flot des « pourquoi » a cessé. Chaque seconde passée en mer donne un sens profond à la vie, car les questions y sont vaines. Nous ne sommes plus dans le monde des doutes et des choix. L’Océan vous en ôte toute possibilité. La décision prise de traverser, il faut dès lors l’assumer pleinement. Car ici, il n’y a plus aucune route qui fait demi-tour, il faut continuer !

Vous l’aurez compris : rien de tel qu’une traversée pour se remettre d’aplomb physiquement et moralement. L’Océan est le psy le plus formidable qui soit ! Un pourvoyeur de bonheur si puissant qu’il chasse tous les démons. Il ressource. Car on y trouve l’exact équilibre entre la vie et ce qu’on en fait. On vit dans SA vie, à la seconde près, incapable de fuir en avant ou de rebrousser chemin. Le présent est notre unique compagnon.

Je ne sais, si une transat a le pouvoir de changer les gens en profondeur. Cela dépend des gens et de leur sensibilité. Chacun y trouve sans doute ce qu’il est venu chercher…

En tout cas, cette expérience élargit le champ des possibles. C’est une réelle leçon de vie ! Une école de la liberté. Un bateau sur l’océan est la clé de la liberté… de toutes les libertés. C’est un luxe inestimable. L’océan est sans doute l’un des derniers bastions de la liberté absolue.

LE PLUS BEAU METIER DU MONDE

Nos collègues « tour-du-mondistes » nous posent souvent les questions suivantes : « n’est-ce pas trop lourd d’entretenir le site ? N’est-ce pas trop de contraintes ? Vous y consacrez vraiment beaucoup de temps… »

J'ai toujours voulu faire deux choses dans ma vie : écrire et me retrouver sur la mer. Chevaucher les vagues et en même temps entendre cette petite voix qui tout au fond de moi décrit tout ce que je vois. Avant que le site n'existe j'ai noirci des pages entières de descriptions de paysage, d'émotions ressenties...

Je revenais de voyage et confiais mes pages à ma maman, ma sœur, qui sont mes plus fidèles lectrices. Mais la plupart de ces pages sont lues par les murs du placard qui les emprisonnent.

Aujourd'hui, je navigue et j'écris... je ne pouvais pas mieux marier mes penchants !
Grâce aux connaissances de mon Cap en matière informatique et grâce au temps qu'il consacre à mettre en valeur les textes ou à peaufiner des albums photos, nous mettons en image nos impressions et fabriquons notre album de souvenir qu’est le site.

Parfois il me suffit de lui dire ; "c'est possible de faire ça ou ça..." et hop.. il clique et re-clique et tel un magicien il fait apparaître sur l'écran la page de mes rêves. Chaque page est un plaisir renouvelé. Nous sommes satisfaits lorsqu'il y a symbiose entre ce que nous avons vécu et ce qui apparaît comme page.

Outre la joie d'écrire et de naviguer, j'ai découvert le bonheur de "travailler" ensemble. Nous réalisons côte à côte des pages que nous partageons avec vous.

Internet est un formidable outil de communication et de liberté. C'est un réel plaisir d'accueillir de nouveaux lecteurs. Certains d’entre eux se signalent par mail et nous envoient leurs impressions. C’est une réelle récompense. Car, le but du site est le partage en toute liberté.

Le seul b-mol dans cette aventure est le coût des communications. Par exemple, nous envoyons le mail du mois depuis le bateau, car c’est le seul moyen de préserver l’anonymat de chaque destinataire. Or le coût d’un tel envoi est onéreux. Pour le reste des mises à jour tout se passe depuis le cyber café. Dans les îles des Canaries nous trouvions des tarifs très avantageux. Parfois moins de 2 Euros de l’heure. Dans les îles françaises et Antigua les tarifs sont prohibitifs (de 7 à 15 Euros de l’heure !). Par contre nous avons trouvé un cyber à la Dominique qui est bon marché. (Prince Rupper Bay)

Conclusion :

Faire un site ne doit pas être vécu comme une contrainte, mais comme un passe-temps, un loisir. Il faut aimer consacrer du temps à l’écriture et à la mise en page. Et puis, il faut prévoir un budget comme pour tout loisir, finalement.

Pour plus d’infos concernant la création d’un site reportez-vous à la page informatique dans le coin du Cap.

 

LE BULLETIN METEO SOUS LES TROPIQUES


Depuis que nous sommes arrivés aux Antilles, au matin d’une navigation, nous ne résistons pas à nous adonner à un cérémonial coupable : nous écoutons la météo ! C’est devenu notre shoot quotidien! Etrangement, depuis que nous sommes de l’autre côté de l’Atlantique, nous sortons toujours complètement hilares de ce rituel.

Nous vous rassurons, la météo ne nous a pas toujours fait cet effet là. Tant que nous avons navigué dans les régions qui si situent au Nord du 20ème degré de latitude, le bulletin météorologique était suivi avec sérieux. D’ailleurs, lorsque nous naviguons sous ces latitudes barbares, nous n’écoutons pas la météo ! C’est une réelle conversion à la METEO ! Il paraît que « la religion est l’opium du peuple » ; pour les marins, la météo est une drogue bien plus forte, pas de sevrage possible, ils la contractent à vie.

Et puis, cherchons à nous approvisionner partout. Les dealers ne manquent pas : CROSS par VHF, Météo France par téléphone, Internet vient au secours des plus accrocs, et la plupart des marins peuvent en consommer depuis le bateau.
Dès que nous avons trouvé un (en général, plusieurs) pourvoyeur de météo attitré, nous l’écoutons avec angoisse, et même si au moment où nous la prenons les conditions sont clémentes, nous ne pouvons nous empêcher de nous demander ce que cela cache. Quand la prochaine dépression va-t-elle nous barrer la route ? La mer ou l’Océan nous laisseront-ils passer ?

Sous les Tropiques, le marin devient très zen, presque nonchalant. La météo aussi, d’ailleurs… Les horaires de diffusions deviennent aléatoires. Nous n’avons droit qu’à des « compléments pour la navigation côtière ». Ce qui importe après tout, c’est que le soleil brille. Il nous est arrivé également en essayant de capter la radio de référence de tomber sur la nécrologie du coin. Nous avons ainsi passé en revue la liste complète des invités au dernier hommage de ce pauvre vieux Séraphin Bonnafé. Au bout d’une heure de ce régime macabre, nous avons abandonné tout espoir de cueillir un jour une météo valable sur les ondes antillaises.

A bord, la VHF est allumée par hasard, le capitaine capte une météo, il tend l’oreille… distraite ! Puis, il ressort l’air enjoué du carré et dit à sa tendre moitié :
« Aujourd’hui il va encore faire chaud ! Ils prévoient des grains, tu penseras à fermer les capots si tu t’en vas…»
Elle demande distraite la température de l’eau
« 28 degrés »
Qui s’inquiétera du vent ?
De toute manière les bulletins se suivent et se ressemblent, vent de secteur Est force 3 à 4… localement fortes rafales (force 5 à 6) sous grains… Mer belle à peu agité côté caraïbe, à agitée sur les côtes atlantiques. Chez les Américains l’ont trouve une météo plus détaillée. Le Hurricane Center de Miami est assez pointu dans le domaine. Mais on y trouve souvent les mêmes expressions du genre : widely scattered showers. (averses généralisées éparses… ce qui en Météo n’est jamais à considérer comme une expression contradictoire !)

Et voilà ! C’est tout ?

Oui… Ou presque. Car ces conditions idylliques sont l’apanage des côtes sous le vent des îles de l’Arc antillais. Mieux vaut donc avoir un bon moteur pour naviguer côté Caraïbe. Et les voiles ? Des voiles dites-vous ? Ho… c’est machins, là… ça peut servir à faire de l’ombre, à stabiliser le bateau dans la houle… A quoi d’autre ??? Non, je ne vois pas !
Bon là j’exagère, …
Si peu à vrai dire au regard des quantités de voiliers qui se prennent pour des fifties (bateaux à forte motorisation et petite voilure)

Par contre, lorsque vous passez d’une île à l’autre, la chanson semble la même, et pourtant, il y a comme un air de différence. Du moins à bord de l’Etoile de Lune ! Car pour la plupart des yachtmen des environs, une bonne motorisation reste le plus sûr moyen de rallier une île à l’autre.

Donc à bord de EDL, rassurés par une météo qui nous annonce à peine assez de vent pour nous permettre de passer la houle. Ha, oui, j’oubliais la houle !!! Cette houle qui nous roule pendant les jours de mi-carême et qui naît plus au Nord de mariages burlesques entre d’énormes dépressions qui se croient au carnaval pendant tout l’hiver. Cette houle dévale tout le long de l’Arc antillais secouant tant qu’elle peut chaque mouillage qui se trouve dans sa ligne de mire et tant qu’à faire les bateaux qui sont dessus !

Dans les canaux et du côté atlantique des îles, la houle croise la mer du vent et lève une mer … mais alors une mer… Non, n’allez pas vous imaginer ça… Elle n’est pas forte du tout ! Mais, elle est drue, cassante. Quand les alizés sont peu établis, les creux moyens sont d’un à deux mètres, mais sous alizés soutenus, ils peuvent atteindre et dépasser trois mètres ! Ce n’est pas tant l’état de la mer, en tant que tel, qui surprend, mais la différence entre la quiétude qui règne derrière les îles, et ce qui nous attend lorsqu’on affronte à nouveau ces petits morceaux d’Atlantique qui veulent à tout prix pénétrer par le petit bout de l’entonnoir que forment les canaux inter-îles.

C’est ainsi, que gagné par la langueur tropicale, vous levez l’ancre, sous le vent de l’île. Vous approchez de sa pointe Sud, la mer se lève peu à peu. Le bateau ne gargouille plus. Finis les petits murmures d’écume sur la coque, celle-ci frappe et cogne la vague qui se forme à mesure que l’île s’éloigne et ne vous protège plus. Le moteur est éteint depuis un moment déjà, les voiles claquent et sonnent, il faut les régler ! Aïe ! Et c’est parti pour du près serré.

Il y a beaucoup trop de Sud dans ce vent d’Est !!!
Ce n’est pas du jeu ! Nous venions là pour gonfler nos voiles d’alizés et surfer dans les vents portants… Nos quatre premiers mois de croisières aux Antilles se sont exclusivement déroulées au près serré !!! Et voici que nous remontons dans 20, puis 25 nœuds de vent … puis… C’est qu’il fraîchit encore… A combien ?

L’anémomètre n’aime pas donner de mauvaises nouvelles ! Alors, il choisit ce moment là pour vous donner une direction de vent à l’opposé de ce qui souffle en réalité et une force aléatoire. A vrai, dire, il a raison de se mettre en grève, au moins quand on ne voit pas à combien ça souffle, on gère le bateau et non la crainte ! C’est alors, qu’on entend un grand bruit ! Ca vient d’en bas dans le carré, une bouteille d’eau, suivie d’une casserole mal arrimée, s’est précipitée dans le fond du carré et entraîne dans sa cavalcade plein de petits copains… Les équipets se prennent pour des shakers prêts à vous concocter un cocktail dernier cri de mayonnaise au tabasco agrémenté de tisane de tilleul. Quant au dentifrice, « tombé en amour » pour le shampoing il y mêlerait, sans nulle doute, ses petites particules… C’est le chaos !

Vous vous préparez à descendre, mais le gîtomètre indique déjà 20 degrés de gîte, la barre devient de plus en plus difficile à tenir et l’éolienne se prend pour une turbine d’avion à réaction et vous somme de penser aux priorités !

Il est donc hors de question de descendre ranger ce qui aurait dû l’être bien avant le départ. Vous filez à l’avant, en pied de mât, prendre un ris (réduire la grand-voile).

Quand vous revenez dans le cockpit, le bateau se sent mieux… il est plus heureux et file à … 8,5 nœuds.
Pas mal !
Pour une caravane des mers de plus de 15 tonnes…si, si c’est pas mal du tout !
Mais peut mieux faire… sous grain par exemple ! Tiens, en voici un justement ! C’est vrai qu’on commençait à s’ennuyer, pas vrai ? Et hop, le gîtomètre repart flirter avec les 20 degrés. Re-bruit dans le fond du carré !
Œil interrogateur du Cap (…)
« T’inquiètes pas, c’est la bouteille, elle vient de se suicider dans le fond de la casserole ! »

Le grain passe, vous pouvez relancer de la toile, et enfin, vous pouvez aller dans le carré, vous rendre compte des désastres. Vous comptez les rescapés, que vous coincez rapidement dans la cabine arrière, pour le reste, plus d’espoir.

Vous remontez satisfait du rangement sommaire et profitez enfin, d’un rodéo d’enfer sous embruns assaisonnés à 27 degrés. L’Etoile de Lune est installée sur son aire et glisse sur l’eau. Rien sur terre ne peut vous offrir cette sensation (surtout après un carénage, la sensation de glisse est parfaite !)
Mais déjà, les côtes de l’île voisine approchent. Quelques rafales, sous les premières hauteurs de l’île, pimentent ce parcours qui aurait presque paru monotone. La mer se calme, le vent vous abandonne, les voiles battent, il est temps déjà de les rentrer,( une navigation sous voile paraît toujours trop courte !) Le moteur prend le relais. Et c’est à ce moment là, que vous voyez le long de votre coque un jet d’eau à 45 degrés. Vous sursautez… Puis, un autre jet, … bébé cachalot attend maman qui est partie en sonde.

Elle n’est pas belle la vie ?


Petite conclusion :

La météo des Antilles est facile, on peut naviguer sans prendre de bulletins, mais pensez à la prendre quand même … avant de partir quel que soit le temps prévu fermez tous les hublots, et rangez votre bateau, pensez aux coups de gîtes…

Avoir du temps permet de choisir son vent. Ainsi il vaut mieux attendre du SE pour monter vers Saint Martin. Et privilégier les jours où le NE souffle pour redescendre le long de l’Arc antillais.

Des sites comme Windguru ou le bulletin de RFI sont de bons indicateurs. En Martinique et en Guadeloupe le Cross avertit de l’émission d’un bulletin sur le 16 (comme partout en France). A Saint Martin, la régularité des diffusions est plus fantaisiste. Le Navtex est un bon allié pour capter les bulletins du Hurricane Center de Miami. Ti’bleu reste un site de référence incontournable pendant la saison des cyclones aux Antilles, il reprend de nombreuses données météo.

En revanche, Max sea n’est pas d’un rapport qualité prix très convaincant aux Antilles, mais est d’une aide très précieuse dans toute la première partie du voyage (îles de l’Atlantique et traversée). Par contre, nous avons remarqué qu’il fallait toujours incrémenter une dizaine de nœuds aux prévisions (quand les fichiers prévoyaient 15 nœuds, il y en avait 25…)

Disposer d’une info météo est une chose, savoir l’interpréter en est une autre. Cela demande de la pratique et quelques tuyaux … Certains articles parus dans Voile et voilier ont été très judicieusement préparés et peuvent constituer une bonne aide. Météo France a édité une « bible » : Météorologie générale et maritime, très bien ficelée.

ETOILES FILANTES EN TRAVERSEE

Une traversée océanique est une expérience qui vous change à jamais. Les nuits de veille si elles sont rendues pénibles par le manque de sommeil restent magiques par tout ce qu’elles vous apportent. Vous êtes seul à la barre. Votre équipier dort. Vous veillez sur la bonne marche du bateau… sur vos vies en quelque sorte. C’est grisant !
La perception des choses change à mesure que le soleil disparaît derrière l’horizon. Les constellations d’étoiles se réveillent une à une et ricochent sur les vagues. Autour du bateau, l’écume étincelle sous l’impulsion de « lucioles » d’eau. L’œil se fait à l’obscurité et scrute le fin fond de l’horizon. Vous êtes seul…
Les sens sont à l’affût de tout ce qui peut vous garder éveillé. C’est ainsi qu’au milieu de l’Atlantique, nous avons assisté à un spectacle fascinant. Nous avons navigué sous une pluie d’étoiles filantes. Au début, je faisais un vœu, comme il est d’usage. Puis, pour la famille, et les amis…Mais, je ne parvenais plus à suivre. Je pense que j’aurais eu un stock de souhaits pour l’humanité entière.

En plus d’étoiles filante, j’ai vu une grosse boule de feu, tomber du ciel… C’était si lumineux que le temps qu’elle dévale du ciel vers la mer, elle a illuminé le ciel et la mer, tel un éclair ! Puis, plus rien…

Un lecteur du site de L’Etoile de Lune a eu la gentillesse de nous expliquer le phénomène auquel nous avons assisté, nous vous livrons ici, l’intégralité de son mail :
« Les météores que vous avez croisées étaient des Géminides; Leur nom provient du fait que le radian (le point d'ou les météores semblent provenir) est situé dans la constellation des Gémeaux, rappelez-vous près de Castor et Polux !

Phaethon est le nom d'un étrange petit astéroïde, probablement le plus gros vestige d'une vieille comète rocheuse et infidèle.

C'est donc de Phaethon "fille de pierre" que se sont échappées les particules qui se sont désintégrées pour votre plaisir.

Désolé mais à priori elles ne viennent pas d'un vent de Lune !

Dans de bonnes conditions - en mer par exemple - on peut en voir jusqu'à 75 par heure au tout petit matin ! »
Michel navigue et peint avec son épouse de magnifiques aquarelles visitez leur site

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